Avant La Documenta de Kassel en 2013, quelques images de ces IllumiNazioni. Que nous disent-elles de l’art contemporain, du comment et du par qui ces nations ont voulu être représentées ?
L’association de la Suisse et du travail de Thomas Hirschhorn est en soi un oxymore : coffres-forts sécurisés face au cristal de résistance de l’artiste dont l’œuvre éphémère et périssable semble ne pouvoir prendre place dans le marché de l’art. L’œuvre se construit dans une sorte d’urgence précaire -la panique dirait l’artiste : caverne où tout est relié, emballé, fixé par du scotch, laissant un sentiment de malaise étouffant tant les images lisses et vulgaires empruntées à des magazines people jouxtent celles, violentes, de la guerre et de ses corps mutilés, décomposés, dans un enchainement digne d’un zapping télévisuel. La douceur de coton-tiges dressés comme menaçants, côtoient des débris de verre hérissés qui rendent la circulation dans l’œuvre périlleuse.
Et puis ce cristal érigé, gigantisé et omniprésent que l’artiste brandit comme un modèle de perfection. A quel cristal fait-il référence ? A celui que contiennent nos ordinateurs ? A celui de la boule de cristal ? Ou celui que l’on découvre au fond de la terre, matière inanimée si bien agencée ? Hirschhorn fait sortir hors de sa gangue rugueuse et mal polie le symbole de l’union des contraires, à savoir celle de la matière et de l’esprit, ainsi que celui de la résistance par sa dureté et son éternité. La richesse et la lumière se trouvent dans cette caverne faite apparemment de bric et de broc. Si illumination il y a, il s’agit ici d’une illumination intérieure et non du miroir aux alouettes de nos sociétés.
Une autre image inoubliable de cette biennale se trouvait dans l’Arsenal, où une modeste vidéo d’un pays d’Amérique latine, montrait un homme, les yeux grands ouverts et aveugles, portant dans ses bras une femme tronc. Tous deux déambulaient habilement sur les trottoirs d’une petite ville, elle repoussant d’un geste de la main les obstacles et les murs. Il était ses jambes, elle était ses yeux.
Avec « We never had a lot of euro around here », une pièce de 25 euro collée sur le sol, le britannique Ryan Gander nous invite à nous pencher vers le futur, en 2036.
Quant à « L’enlèvement des Sabines », grande sculpture de cire d’Urs Fischer, elle s’est consumée tout au long de cette biennale. Le temps a fait son œuvre.