Le found footage photographique des Attractions de Christian Milovanoff

L’exposition la plus novatrice de cette actuelle Biennale de la Photographie de Mulhouse organisée par Anne Immelé est visible à La Filature jusqu’au 2 septembre. Rassemblant trois séries récentes de la production de Christian Milovanoff elle s’accompagne de sa projection vidéo sur le making of de son livre « Bureaux » et le travail dramaturgique qui l’a précédé. Chaque ensemble propose une interrogation spécifique du statut des images qu’il soumet à toutes sortes de phénomènes d’Attraction(s).

A côté de son intérêt pour l’histoire du cinéma qu’il illustre dans ses conférences comme dans ses posts réguliers sur Facebook il entretient depuis fort longtemps une collection d’images de différentes origines éditoriales, livres, journaux, magazines, affiches. Dans leur remise en activité on peut l’assimiler à ce que dans une chronique récente d’Art Press Etienne Hatt appelle les photographes archivistes.

Il intervient sur ce qu’il nomme « ses images de compagnie » par découpage, agencement, une forme de montage qui à l’intérieur d’un même cadre peut produire diptyque ou quadriptyque. Les fragments icôniques se télescopent sans souci des époques ou des cultures dont elles
sont issues. Ce brassage par collision négociée produit un sens inédit dont la force visuelle reste le premier atout.

Nous avions découvert avec intérêt la série des Attractions 1 au Musée Réatttu il y a 4 ans, encadrés et avec passe-partout ces petits tableaux jouaient d’images superposées offrant par exemple recto et verso d’une page imprimée ou rapprochant des réalités que l’idéologie souhaite voir séparées. Les titres contribuent à nous éclairer sur ces mises en relation singulièrement porteuses de sens. L’ensemble de ces œuvres est ici accroché chronologiquement, ce qui répond à l’intérêt de l’artiste pour le temps de la fabrication, du work in progress.

Une série précédente, titrée de façon semblable est exposée pour la première fois, le montage photographique est le plus souvent composé de deux images occupant le plein cadre. La logique textuelle est poussée plus avant dans la quête de la suggestion d’un sens. Les télescopages de situations historiques ou culturelles trouve une formulation claire. Ces cadres sont ici accrochés par quatre

Une troisième série inédite prend la forme d’affiches produites en dos bleu. Si chacune a son autonomie, due notamment à la puissance du texte qui estampille les images, l’ensemble est construit comme le déroulé d’une séquence , la transition d’une affiche à l’autre s’effectue par des glissements de valeurs colorées. La fluidité du sens est pareillement répercutée par les variations textuelles : on passe ainsi de « La mode avant Guantanamo » à « Soldate israélienne après Guantanamo et fleurs palestiniennes » jusqu’à l’ouverture sur « Syrie et autres questions ».

Les logiques mises en œuvres pour l’accrochage bien que différenciées testent des formes de montage héritées du cinéma et réappropriées par l’auteur. La scénographie de l’ensemble permet aux nombreuses figures ou silhouettes humaines présentes de retrouver des formes chorégraphiées graphiquement. Beaucoup de vidéastes et de cinéastes expérimentaux ont travaillé sur des archives préenregistrées, Christian Milovanoff pratique à sa façon le found footage dans une pratique de fiction documentaire critique au service des grands et petits récits du monde.