Une sélection serrée d’expositions se donne pour horizon l’exploration inquiète des nuages qui nous menacent parce que drones, caméras de surveillance et diverses armes plus violentes les unes que les autres y prolifèrent. Sous titrée la photographie au temps des conflits cette édition oppose à ces menaces abstraites des revendications identitaires de ces potentielles victimes qui ne veulent plus rester anonymes.
Ce ciel menaçant est d’abord celui du 11 septembre, qui sert d’arrière fond idéologique à l’exposition titre du Casino Centre d’Art Contemporain. L’artiste collectionneur Hans Peter Feldmann fait revivre l’événement avec un ensemble de Unes de journaux internationaux, tandis que sont remontrées les images de Richard Drew (Associated Press) qui ont été longtemps retirées sous la pression d’une demande d’(auto)censure pour ne pas exposer les victimes tombant des Twin Towers. En référence à l’abstraction géométrique Sinje Dillenkopfer organise en tableau les emplacements des poutres des tours comme autant de cicatrices des ces architectures.
Sur un mode plus léger cette scrutation du ciel est l’objet des Contes d’Images , installations à ciel ouvert présentées à Clervaux sur le mode scientifique des images de la recherche spatiale de Vincent Fournier, ou des approches poétiques de Corinne Mercadier et humoristiques de Janne Lehtinen et ses Sacred Birds. La menace reprend sa forme technologique avec les avions de combat deValentin Vallhonrat qui servent d’affiche à la manifestation.«
La question de l’émigration est abordée par plusieurs projets, ceux réunis par Alessandra Capodaqua autour du concept de Shifts opposent les cieux imaginaires des espaces individuels de poussières devenues cosmos de Stefano Parrini au vision en plongée des files d’attente d’émigrés sur leurs chemins vers une liberté rêvée, des images devenues presque abstraites sous l’objectif de Rocco Rorndelli. Au Centre des Arts Pluriel Ettelbruck Carine et Elisabeth krecké utilisent quant à elles Google view pour scénariser ces « Displacements » et leur « Pérégrinations ».
A partir de l’hommage à son père déporté résistant Christian Gattinoni appelle à redonner visage sinon identité à toutes sortes de victimes anonymes du XX° siècle. Accueilli dans le cadre prestigieux du cloître de l’Abbaye de Neimenster qui fut aussi le site de la prison du Grund d’où partirent tant de déportés luxembourgeois cet ensemble nous invite à activer la mémoire pour lutter contre tous les fascismes aujourd’hui de nouveau si actifs en Europe.
Au Musée National d’Art et d’histoire Portraits sous surveillance généralise le rôle des média pour donner à voir à travers les phénomènes de surveillance les sursauts identitaires.Daniel Mayrit dresse le constat des forces en présence dans ces luttes idéologiques avec ses Authorized Images. June Kastelic met en valeur le jeu des émotions télévisuelles avec ses Présentateurs de la Mort. Jules Spinatch développe son Suveillance Panorama Project avec les caméras de contrôle du Vienna Opera Ball. Aida Silvesti superpose aux portraits floutés de personnes déplacées la matérialisation de leur long périple des pays en guerre vers d’autres contrées moins menacées. Quant à l’artiste luxembourgeois d’origine portugaise Marco Godinho il installe un ensemble de portraits officiels de ses compatriotes dont les visages de leur carte de résidents sont caviardés.
Cette réflexion sur la communication des corps politisés se poursuit avec l’excellente installation dans la galerie Nei Licht de Y a pas photo de Bruno Baltzer et Léonora Bisagno. Ces Corps célestes se trouvent fragmentés et confrontés à divers slogans de luttes pour des identités revendiquées.
L’une des expositions les plus convaincantes de cet ensemble radical est sans conteste Empire de Samuel Gratacap qui a été aussi récompensé par le prix Arendt et Medernacht. Toujours en recherche de lieux de transit il a plusieurs années exploré le camp de Choucha en Tunisie à quelques kilomètres de la frontière lybienne. Les courtes vidéo qu’il en a ramené sont filmées au plus près des différentes populations. Ses photographies témoignent aussi de ces présences fantômatiques confrontées au tempêtes de sable et à l’absence d’espoir.