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L’aventure n’est qu’une volte-face, Pierre Huyghe au Musée d’Art Moderne

On cache souvent sous les allures du neuf ce qui a été enseveli sous le poids de la culture. L’exposition prologue de Pierre Huyghe se fait l « occasion d » un voyage dans le temps qui nous emmène depuis l’aventure défendu par l’artiste comme expérience individuelle à l’event prôné par les artistes de Fluxus.

Aventure « 

Qui n’a jamais entendu prononcer le mot » aventure « dans la bouche de nos contemporains, artistes, critiques, galeristes, commissaires ou collectionneurs comme une entreprise magique depuis laquelle on sort grandit » Qui n’a jamais douté de l’apparition de ce mot dans notre langage courant, comme l’importation d’un lexique exotique venant masquer notre banalité ? C’est pourtant au travers de ce mot que Rosalind Krauss signale la traduction ainsi que le vif intérêt que lui portèrent les artistes seulement dans les années 70), il semble néanmoins abonder dans le sens du philosophe et défendre avec lui un nouveau cogito, « toute conscience est conscience de quelque chose » . Toute chose, en ce sens, appellerait une conscience, ou du moins pour le philosophe, l’établissement d’un monde pré-objectif. Et c’est sur ce pivot que se construit 4’33’’, et qu’ensuite le flux de la vie célébré par les artistes des années 60 puis par Pierre Huyghe prend tout son essor. L’aventure ou l’event, entraîné dans ce flux, ne sont pas tant l’affirmation d’un temps individuel prenant ancrage dans un « ici, maintenant » , que le retournement d’une conscience : ainsi ce n’est plus le sujet qui est la charnière du monde, mais le monde des choses qui en porte la conscience. L’aventure de Pierre Huyghe est de nouveau l’histoire de ce retournement, ainsi que le suggère peut-être la marionnette figurant l’artiste venant clôturer le parcours de ce premier volet de Celebration Park.