Quand l’autoportrait n’est plus « présumé innocent »

En nos périodes de confusions idéologiques maximales comment faire entendre à des étudiants en art travaillant aujourd’hui leurs responsabilités d’artistes et de citoyens.
On les avait amenés en tant qu’enseignants ,critiques ou simples personnes morales à signer cette pétition contre l’inique procès faiut à Marie-Laure Bernadac, Stéphanie Tremblay et Mr. Cousseau pour de prétendues œuvres pédophiles au CAPC de Bordeaux sous le titre « Présumés innocents ».

Voilà qu’une étudiante chinoise Ko Siu Lan par un travail d’affichage de kakemono sur l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts de Paris dont H. C. Cousseau est devenu directeur est l’objet d’une censure. Sur ces bannières on pouvait lire en blanc sur noir les mots « gagner » « moins », « travailler », « plus » détournant un slogan de notre hyperprésident.
Sans intervention( ???) la direction décroche l’œuvre et l’horreur se révèle donc d’une autocensure. Quatre jours plus tard nous apprenons le rétablissement de la pièce suite à une intervention du Ministre de la Culture Frédéric Mitterrand. Notre soutien reste entier à Stéphanie Tremblay et Marie Laure Bernadac, et Henri Claude Cousseau jusqu’à plus ample information.

En plein débat pipé sur l’identité nationale alors que l’armée française recrute sur devenezvousmême.com (sic) et après de nombreuses expositions récentes sur l’art des femmes , rattrapage des impasses , censures et omissions des années 70 nous ne pouvions que vanter à nos étudiants les vertus identitaires et esthétiques de l’autoportrait, photographique notamment, activité supposée elle aussi innocente quant à ses conséquences politiques, précaution n’est pas autocensure.

C’était sans compter sur la susceptibilité de l’hypersuperprésident iranien. Nous avions apprécié les autoportraits de Mehraneh Atashi présenté au Musée du Quai Branly à l’automne dernier. Sa présence épiphanique au premeier plan de l’image donnait une puissance charnelle aux paysages iraniens de second plan. Nous avions déjà goûté l’humour distancié de ses vues prises dans les centres de lutte masculine les Zourkhaneh, on y sentait l’acte transgressif d’une qui tentait de déplacer les frontières de son champ de compétence.

Sa présence à la manif du 26 décembre 2009 a transformé soudain ses autoportraits en pièces à conviction à charge. Elle a été enlevée en même temps que son mari et détenue dans un lieu secret. Depuis la mésaventure de Clotilde Reiss on ne peut même plus recommander à nos étudiants le photophone.
Quels théoriciens affirmaient il n’y a pas si longtemps que les pouvoirs de l’image s’évanouissaient, se virtualisaient avant disparition ?

Au moment où se diffuse le logiciel Layar sensé apporter à l’image autant de couches de réalités augmentés, nos réalités idéologiques, les communautarismes les pouvoirs se durcissent jusqu’à sentir dans une expression individuelle au féminin une menace à leur hégémonie.