Ne pensez pas que ce soit simple d’aborder une œuvre intitulée « Sans titre ». Sans cartel, rien n’est là pour rassurer le visiteur éventuel. Comprendre. Comprendre l’incompréhensible. Se laisser guider par l’émotion et accepter d’entrer dans un univers autre, horizontal. Don’t think that it’s easy.
Pour B. T.OR.M F.
Œuvre éphémère, démontable, monumentale malgré sa légèreté « sans titre » est une œuvre paradoxale, et sa couleur grise monochrome rappelle celui de la pierre, du ciment. Casier de bouteilles vides à la Duchamp, rien n’est moins sûr. Quatre éléments de polystyrène, matériaux sans noblesse ? Pourtant. Alvéoles grises comme de la poussière de lune, emboitées, découpées selon un axe arrondi et vertical « sans titre » est un rêve paradoxal. Les cratères se dessinent, courbes échancrées, et la lumière se devine, plus encore, source éclairée graduée de molécules. Les particules deviennent élémentaires.
Comprendre. Comprendre l’incompréhensible et se réfugier derrière le paravent de mots savants.
« Sans titre » est un travail presque éolien. Empreintes de l’artiste dans ces découpes fragiles, ombres portées dessinées sur le sol gauche telle une montagne, minuscules pépites grises, le travail de Vincent Mauger semble un tableau descriptif d’une nature en danger.
Pour découvrir le paradoxe de pierre, il faut allumer la lumière, descendre soigneusement l’escalier, regarder le mur de pierres apparentes et la beauté est révélée. Puissance d’une œuvre constituée d’éléments polystyrène de 95x71x20 cm son univers loin du numérique, offre une dimension onirique où la forme est essentielle. Nature minérale, astéroïde déposée sur le sol, contextualisée, presque galactique, « sans titre » ( 2008) offre un espace modulaire, poétique même.
Vincent Mauger n’expose pas seul à la galerie, exposition collective, les oeuvres se confrontent : Paul Raguenas (2010), Vincent Dulom (2010), Jean-François Leroy (2010), John Cornu (2010), Aurélien Mole (2010), Guillaume Constantin (2010), Vincent Mauger (2008). Leurs goûts communs pour la matière physique et picturale, Bertrand Grimont a choisi une scénographie qui les met en lumière grâce à des passerelles, des ponts entre deux propositions plastiques ; il met le réel à l’épreuve dans une ponctuation d’œuvres contextualisées : « La Science des Matériaux a permis de pousser toujours plus loin l’analyse de la matière, au point de parvenir à en reconstituer la structure, jusque dans ses moindres détails, aux moyens de combinaisons synthétiques toujours plus élaborées. Pour autant, c’est moins dans la perfection des atomes constitutifs de la matière que dans sa marge d’imperfection, dans ses défauts structurels, que réside depuis toujours l’intérêt des scientifiques. » Christian Aladente in catalogue de l’exposition « théorème ».