La dimension critique du réseau

Revue d’art depuis 2006

Arles OFF, toujours mieux avec moins

Dans le temps compté de la semaine d’ouverture d’Arles il est impossible de répondre à toutes les incitations du festival off. Si Voies Off apporte une aide en labellisant un certain nombre d’expositions (une centaine cette année) il reste à sélectionner lieux et initiatives. Pour cette édition beaucoup de propositions se professionnalisent.

Les initiatives Voies Off

Comme chaque année le festival a reçu plus de 3500 envois pour le Prix Voies Off, parmi les 60 dossiers retenus et projetés trois ont été récompensés Arko Datto (venu d’Inde) présentait Will my mannequin be home when I return , qui choisit l’espace de la nuit comme accélérateur de situations, originaire du Canada et vivant en France : Coco Amardeil portraiture des jeunes émergent de l’eau : Come hell or high water. Vittoria Menstati & Daniel Tepper (issu de l‘Italie et des Etats-Unis) nous ont intéressé pour le prix lacritique.org avec leur deux séries complémentaires From Above et Thermal Gaza (étude bientôt en ligne).

A la galerie Voies off, après son exploration des paysages montagneux, Richard Petit évoque pour Cosmonaute ! l’imaginaire de la conquête spatiale où il met en scène ses deux petits fils dans un style volontairement kitsch, réactivant les codes visuels de la bande dessinée et du film de série B. En complément de courtes vidéo réunies sous le label « le futur antérieur », l’esthétique minimaliste, relatent avec humour l’histoire d’une technologie qui ne marche pas…

Le off accueille aussi des manifestations parisiennes qui se délocalisent comme l’excellente foire Fotofever accueillie à la fondation Manuel Rivera-Ortiz où l’on pouvait retrouver avec un certain nombre de leurs galeries partenaires des formes plus documentaires comme les interrogeant portraits de Christophe Beauregard sur les détatoués ou les fictions familiales de la japonaise Mami Kiyoshi à la toujours exigeante galerie Annie Gabrielli.

Quatre approches de l’intime

Françoise Galeron collabore avec le poète Christian Pic sur le thème de l’oubli : ses nouvelles images couleurs, Léthé, résonnent de troubles situations où le quotidien devient fantômatique.
Au Fotohaus du ParisBerlin Fotogroup une atmosphère assez proche était mise en scène par Claire Laude et Michel Le Belhomme dans une approche collective de l’Errance Blanche on y retrouvait en plus de leurs œuvres celles de Matthieu Gafsou et David Favrod.
Sophie Knittel et Michel Slomka ont retenu 33 photographes du groupe Hans Lucas pour l’exposition Supernatural qui investit un vaste hôtel particulier. On y retrouve avec bonheur la recherche intime de Gaelle Abravanel sur le syndrôme de la bipolarité dont elle transcrit en couleurs saturées les phases alternées. La découverte de cette ensemble pour moi est Bérangère Fromont dont les images subtiles constituant une survie minimale I don’t want to disappear completely dialoguent avec l’environnement mobilier du lieu.
A l’Atelier du midi De la vie pour en faire quelque chose réunit Virginie Blanchard, Prune Phi et Françoise Beauguion qui s’attachent à l’humain, sa mémoire, son actualité et son devenir. Réctivant des photographies d’archive de famille, elles amorcent des narrations, dépassant la composante affective et documentaire. La plus plasticienne des trois Prune Phi nous parle de sa quête de ses origines avec une très haute sensibilité.

Des pratiques engagées

Dans Supernatural on pouvait apprécier aussi la proposition du collectif VOST, créé en 2012, s’attachant à Photographier l’exil. On y remarquait entre autres les propositions et installations d’Olivier Sarrazin et Matthieu Rosier.

Après son hommage à Van Gogh l’an passé Graziano Arici présentait un ensemble intégrant sons, images et textes. A l’invitation de l’atelier cinq et de Corinne Dumas, sa responsable Rosencrantz And Guildenstern Are Dead
est une série inédite abordant radicalement le phénomène de la guerre, dans ses dimensions historiques et contemporaines.

La Fisheye Gallery créée en octobre 2016 prenait ses premiers quartiers d’été à Arles accueillie au Magasin de Jouets. Le travail le plus surprenant et qui nous interpellait le plus subtilement, redonnait le regard aigu de Jean-Christian Bourcart sur les manifestants pro-Trump. Diptyques et triptyques réunissent ces fanatiques en ces Jours de Colère.

Deux plasticiens

Lhoste Art Contemporain invitait Reeve Schumacher, américain vivant à Arles, connu pour ses performances sonores utilisant platines et vinyles préparés pour son hommage à Mireille Mathieu. Collection ses disques et leur pochette il les déforme selon ses habituelles spirales. Drôle et décalé.

La Galerie Inside Out honore le 40ème anniversaire de l’assassinat de P. Pasolini, grâce aux travaux d’ Ernest Pignon Ernest, réunit sous le titre Se Torno. Dans ses voyages entre Rome, Ostie, Matera et Naples l’artiste colle ses sérigraphies dans les lieux hantés par le poète et cinéaste.

Quand les responsables institutionnels vont ils comprendre que la baisse constante de leur aide à ce fabuleux festival témoin de la création photographique au niveau international vont continuer à en mettre en danger l’existence même ? Notre nouvelle ministre de la culture qui a fait toute sa carrière éditoriale et d’aide à la création en Arles sa ville d’origine va –t- elle prendre en compte l’apport irremplaçable de Voies Off à côté des autres initiatives de la ville. Leur survie nous est indispensable.