Installé depuis trois ans au Grand-Palais, ARTPARIS est devenu en dix ans l’un des rendez-vous incontournables parisiens pour les acteurs et les amoureux de l’art contemporain international. 115 galeries d’art moderne et contemporain dont un tiers de galeries étrangères venues de quatorze pays on été choisies pour leur exigence de qualité et la variété de leur choix artistique. Concomitance intéressante : les jeunes galeries trouvent place aux côtes de galeries historiques offrant un vaste panorama de la création artistique des XXème et XXIème siècles : peinture, sculpture, dessin, photographie, vidéo, performance, installation…
Selon Henri Jobbé-Duval, directeur artistique, les œuvres sélectionnées dans cette foire « répondent à une démarche de collectionneurs qui entretiennent des liens de fidélité avec la manifestation et ses galeries et qui considèrent l’œuvre d’art comme une démarche culturelle et émotionnelle ». A chaque visiteur de faire une rencontre où l’émotion l’emporte. Voici mes choix.
La galerie Lélia Mordoch, www.galerieleliamordoch.com, offre son espace à l’artiste argentin Julio Le Parc, né en 1928, membre actif du GRAV. Dichotomie noire et blanche, les œuvres de Julio Le Parc jouent du mouvement. Certaines œuvres cinétiques sont interactives. Noir et blanc à la Vasarely, « Instabilités » (1959-1991), acrylique sur toile, 200 x 200 cm, capte la lumière. L’artiste utilise également le bois, le métal, l’acier, les moteurs, l’électricité… L’objet de sa recherche se centre sur les formes géométriques et rigoureuses, le mouvement, la distorsion. C’est à partir de 1965 qu’il crée des œuvres cinétiques. Certaines œuvres sont des mouvements optiques, d’autres encore, des tableaux-mobiles dans l’espace dont « Mobile rectangle argent sur noir » (1967) qui invite le regard à une échappée belle vers l’horizon de la mer, la nature, le bruissement du vent dans les feuilles, le reflet dans l’eau.
La galerie RX, www.galerierx.com, voit le jour en 2002 et présente cette année un peintre coréen Lee Bae, « sans titre », médium acrylique et charbon sur toile, 130 x 97 cm (2008), et un accrochage collectif de Philippe Pasqua, Françoise Pétrovitch, Georges Rousse, C. Teisseire. Lee Bae vit et travaille à Paris depuis 1990. Il a étudié les Beaux-Arts de Séoul. Ses œuvres noires sur fond blanc ou crème font jaillir la respiration, l’instant fugace d’un haïku : « Pierre Soulage l’a souvent répété : ce n’est pas le noir qui l’intéresse mais la façon dont le noir fait réagir la lumière (…). Il en est de même avec Lee Bae, mais à l’inverse : ce ne sont pas les espaces blancs ou crème (…) qui lui importent, mais la manière dont ils permettent un puissant contraste avec les continents noirs peints dans ses tableaux (…). Ce noir rappelle ses origines asiatiques : l’encre de Chine, la calligraphie et il l’a d’abord abordé avec du charbon de bois » (Henri-François Debailleux, in Vers l’intérieur). Au début des années 2000, l’artiste substitue au charbon de bois du charbon de bambou qu’il mélange à du médium acrylique encore plus noir. Cette densité du trou noir se vêt d’une énergie fabuleuse qui permet la contemplation qui se mêle à la création : « le blanc est un nid et un vide de couleur » dit l’artiste.
La galerie Eric Seydoux, www.ericseydoux.com, expose cette année les « Objets de silence », ensemble de pièces inédites que l’artiste Bernard Moninot a réalisées avec Eric Seydoux. Un rêve fut l’inspiration de ces sculptures de l’impossible.
La galerie clermontoise Claire Gastaud, www.galerie-gastaud.com, a invité des artistes comme Nils Udo. Né en 1937, il vit et travaille en Haute-Bavière. Il commence à travailler sur et avec la nature et loue des terres sur lesquelles il réalise ses premières plantations d’arbres et de buissons. La nature est au centre de sa vision du monde. Ses photographies dont « Maison d’eau » (tronc d’épicéa, branche de bouleau, osier et plantation de gazon), Mer des Wadden, Cuxhaven Allemagne, ou encore Nid d’eau (1976) appartiennent au « Towards Nature », prolongation du rêve de la nature. « Dans le sillage de ses installations apparurent des mouvements analogues en Italie, en Angleterre, en France, aux U.S.A, et en Autriche (…). Cet « Art in Nature » ou encore « Towards Nature » est le travail d’artistes « qui interviennent dans la nature sans lui causer de dommage irréversible. Dialogue spirituel et esthétique, l’œuvre de l’artiste appartient à la fois à la nature qui se développe en toute liberté et à celle que la main de l’homme qui l’a façonnée. » (Prof. Dr Dieter Ronte, Kunstmuseum, Bonn).
Samuel Rousseau, quant à lui, vit et travaille à Grenoble. Plasticien, vidéaste, photographe, la poétique de son travail repose sur sa manière de mêler les technologies les plus complexes à des matériaux ou objets d’une extrême simplicité. Il interroge ainsi l’absurdité de la condition humaine. Ses « Fleurs de kérosène », 98 x 50 x 20 cm (2008), sont réalisées en sac plastique et disposées dans un jerricane en aluminium. Argentées, graciles, ces roses scintillent sous l’effet d’une vidéo projection. Ce bouquet évanescent n’est pas sans nous rappeler l’inéluctable nécessité de sauvegarder la beauté de notre terre.
La galerie Olivier Waltman, www.galleriewaltman.com, consacre un one-man show au jeune photographe plasticien, Aleix Plademunt, qui vit et travaille à Barcelone. « Espectadores », série de 2007, appartient à un projet questionnant le rapport de l’homme et de l’espace : « quand l’homme meurtrit un lieu, une zone géographique pour satisfaire des besoins déterminés et éphémères, le paysage humanisé devient immanquablement un paysage modifié. » (Aleix Plademunt). Une série de chaises est disposée comme sur une scène de spectacle face à ces paysages dénaturés. La présence du spectateur est préfigurée dans ces chaises en bois. L’artiste s’intéresse à la magnificence de l’immensité des espaces. Mais il constate qu’il ne reste plus d’espace vierge, bien que le paysage soit « notre langue maternelle ».
La galerie suisse Ditesheim, installée à Neuchâtel, www.galerieditesheim.ch, a été créée en 1972 et expose notamment cette année Zoran Music, Germain Richier et Rolf Iseli : « Steinfrau Blau », gouache, pigment, fusain, pointe sèche, 185 x 112 cm (2007), et « Steinfrau », peinture gouache, pigment, fusain, pointe sèche, 185 x112 cm (2008). Ces femmes nues de dos, peintures figuratives, sont empreintes de la sensualité des traits du fusain.
La galerie Paris Globe, info@parisglobe.fr, joue de la confrontation entre la photographie d’hier et celle d’aujourd’hui à travers les clichés de Pierre Molinier, Erwin Blumenfeld, Annette Messager, Manuel Alvarez-Bravo, Valentine Fournie, Jaume Plensa et Erdos Gabor. Celui-ci a réalisé, après un voyage dans les camps de concentration, un mur de photographies où les poupées Barbie représentées ont subi le sort des déportés : crâne rasé, uniforme, et numérotation gravée dans la chair plastique.
La galerie Daniel Lelong diffuse l’œuvre d’artistes contemporains comme Tapiès, Kounellis, Appel, De Maria, Alechinski, Pagès, Ernest Pignon-Ernest et expose entre autre le sculpteur Jaume Plensa qui utilise des alphabets de différentes langues pour dessiner la silhouette d’homme dont « Nosotros » (2008), en acier inoxydable peint en blanc, installée à l’entrée du Grand-Palais et haute de 5 mètres. Ces sculptures représentent un homme assis dans un alphabet de silence aérien.