Designer helvétique, élève de Arts Décoratifs de Paris. En effet, il apparaissait particulièrement intéressant que ce ponte du graphisme contemporain expose sa vision de la pédagogie, et son expérience de l’enseignement. Juste une mise au point.
« Apprendre avant de créer » fût l’entrée en matière de Rudi Meyer quant à la méthodologie car l’on ne peut envisager la pratique sans la théorie ou la forme sans le fond. Ainsi, note-t-il la difficulté des élèves à « penser en l’image en terme de concept » car bien souvent ils ne chercheront qu’à illustrer le propos par une image archétypale, réduisant ainsi le dialogue texte/image à une narration simpliste. Il est question ici de l’apprentissage du signifiant / signifié pour fonder une méthodologie à partir de nos perceptions et d’en dégager une représentation intellectuelle, un schéma qui représenterait le circuit de l’émetteur (réflexion / perception) et du récepteur (perception / réflexion). C’est pourquoi l’émetteur, s’il veut transmettre en langage créatif, devra se constituer de systèmes référentiels aussi bien culturel, social, que politique. Ces étendues cognitives, lorsqu’on les (re)connaît deviennent source de nouveaux espaces, la créativité manipule nécessairement la compréhension en liant, en interpénétrant, en tordant l’intelligible.
Le partie pris déploie ici tout son sens : quelles parties de cette réalité prendrons-nous ?
Par ailleurs, Rudi Meyer encourage ses étudiants à étendre leurs connaissances conceptuelles et pratiques par l’apprentissage de différentes méthodes de conception, intégrant du même coup les particularités de l’enseignement pluridisciplinaire. La connaissance de la chaîne graphique par exemple n’est pas une fin, elle est un vecteur déterminant le mécanisme de construction permettant de concevoir. Et si l’on ne possède le sens d’un mot que lorsque l’on est à même de traduire sa signification, il en va de même pour la méthode.
« L’outil imprime un comportement » poursuit-il. Cette affirmation ne désigne pas le rapport aliénant du graphiste et de ses outils, mais, bien au contraire éclaire la notion de choix et de parti pris techniques de l’auteur. Et si la maîtrise est de rigueur, l’expérimentation n’en est pas moins omniprésente, permettant au graphiste de découper dans le champ de l’expérience. En effet le laboratoire plasticien permet la constitution de systèmes intuitifs liant sujet et objet. Ce qui permettra a posteriori une réflexion sur son propre processus créateur.
Les constructions, les sonorités, les rythmes sont des notions exacerbées de l’intuition qui permettent une exploration de combinaisons où s’agglomèrent les mediums, multipliant les points de fuite et de facto les perspectives. Ces recherches expérimentales délivrent également le graphiste des contraintes du marketing et de sa logique quantitative qui tendent à une uniformisation linguistique.
Ainsi, le graphisme ne se réduit ni à aiguiser nos sens perceptifs, ni à répondre d’une commande.
Sa fonction n’est pas pratique, sa pratique n’est pas stylistique, et son style est son absence de style. Toute qualité fortuite d’un sujet qu’on pourrait lui retirer sans le modifier fondamentalement : Un accident ?