Carte blanche à Duy Anh Nhan Duc

Duy Anh Nhan Duc a fait du pissenlit un végétal qu’il n’a de cesse de comprendre et d’expérimenter afin d’envisager différents possibles. L’artiste tend à renouer des liens avec les plantes sauvages.Pour sa carte blanche au Musée Guimet, il a réalisé quatre installations pour nous convier à un voyage initiatique.

L’espace de la rotonde au 4e étage constitue le lieu d’une méditation et d’une introspection : « Un moment un peu hors du temps où on pourrait marquer une pause dans notre quotidien souvent très agité pour mettre en perspective notre façon d’être au monde et la crise écologique qu’on est en train de vivre et à laquelle nous participons. » selon l’artiste. Chaque œuvre constitue une étape vers une prise de conscience de la fragilité et de la capacité de résilience du végétal.

C’est d’abord un mur qui nous arrête. Sur celui-ci, se découvre une forme géométrique composée d’aigrettes de pissenlit. La plante symbolise une force qu’on acquiert en étant plusieurs. Une ouverture, une échappée est alors possible. L’artiste soucieux des problématiques que subit notre planète nous invite à prêter attention à la biodiversité qui nous est proche. À partir de plantes sauvages qu’il a soigneusement cueilli à Paris, il a créé un parterre le long des murs. Dans Le champ des possibles, des « graines en dormance » annoncent la croissance d’une végétation urbaine à préserver. Des souvenirs de promenades, de cueillettes et de relations que tout un chacun peut entretenir avec le vivant végétal peuvent surgir tout au long de notre parcours.

Sur ses Monochromes, apparaissent des formes géométriques, composées d’une quantité d’aigrettes. Ces figures évoquent des plans de jardins, de potagers, de labyrinthes… Ses œuvres délicates nous émerveillent et nous invitent alors à redécouvrir la beauté de l’éphémère. Pour l’artiste, ces éléments naturels qu’il a pris soin de récolter et de conserver sont porteuses d’un certain espoir. À partir de chaque graine un renouveau se forme. Un sentiment d’un monde où le végétal pourrait croître en toute liberté émerge également.
Puis, une envolée d’aigrettes nous émerveille. Dans une construction qui s’apparente à une serre ou à une cabane, conçue à partir de fenêtres récupérées, l’artiste a introduit un mécanisme, invitant à l’activer. Un sentiment de joie enfantine et l’envie de faire un vœu naissent en nous, comme la promesse d’une transformation à venir. Nommée Le parloir des souhaits, cette œuvre nous convie à prendre le temps de nous interroger sur ce que nous aimerions protéger et sauver. Chaque petit être incarne une régénérescence de la vie végétale.

Dans son installation Les racines du ciel, un gland germe et cherche la lumière. Protégée à l’intérieur d’une calebasse, « réceptacle d’une forme de vie » selon l’artiste, cet arbre en devenir témoigne de la puissance du végétal, capable de croître et de s’adapter à diverses conditions, même les plus difficiles. Duy Anh Nhan Duc nous invite alors à observer cet être, témoin d’une renaissance.

Peu à peu, le rêve s’installe : des images de champs parcourus et le plaisir de contempler une végétation sauvage, à différentes saisons. La vie des plantes est précieuse et l’observer avec patience nous conduit à nous évader pendant un instant. Dans ce lieu où les pissenlits portent en eux l’espoir d’une métamorphose, nos pensées nous guident vers l’extérieur et nous amènent à regarder avec attention la flore des milieux urbains. Cette exposition, lieu de l’attention, de l’expérience sensible et de la réflexion, ouvre ainsi de nouvelles perspectives pour songer au soin que nous devons porter à notre environnement. Elle stimule notre capacité de nous émouvoir face au végétal et la nécessité de reprendre notre souffle pour garder en mémoire sa forme, ses couleurs, sa beauté. Continuons d’admirer les merveilles de la nature et envisageons des manières de veiller sur elle, tel est le message de l’artiste « plasticien du végétal ».