Après « Small eternity, America » et « La mue », « Elysian fields » est le nouveau livre d’Ayline Olukman publié par Médiapop. Epopée sensible où s’enchaînent les images d’un univers onirique multipliant formes et supports, Elysian fields sans être rétrospectif est un ouvrage qui embrasse tout entier le travail de l’artiste.
Le livre en tant qu’objet répond pleinement par sa forme à l’univers d’Ayline Olukman, la sensualité est déjà là, à travers le jeu soigné de la typographie, les papiers, la double couverture lisse, brillante et matte, le serpent arabesque qui se balade et annonce cet espace de la transformation et de la quête de soi, puisque c’est de cela qu’il s’agit, se connaître soi-même, inventer des mondes pour pouvoir y vivre, chercher son propre visage, dans « le bleu du noir ». Ayline Olukman a longtemps vécu aux Etats-Unis, a exposé, un peu partout dans le monde, ce nouvel ouvrage est une traversée intime, où l’on entre pleinement dans le processus de création.
Tout ici est poreux et protéiforme, Ayline Olukman peint, photographie, dessine, colle, esquisse, écrit des poèmes, ouvre ses carnets, son atelier, tout s’interpénètre, tout est dans tout et l’œil épouse ce chant mélancolique entre baigneuses, montagnes et natures mortes, une image en plusieurs temps d’un certain paradis qui en appellent d’autres, peut-être anglais et surannés, baroques ou romantiques. L’Elysée est là, humide et ensoleillé, voilé, en songe d’été éternel. Feu, terre, air, eau, c’est la roue de Bachelard et ses associations sensibles qui plane.
Elysian Fields est un chant qui se déploie aussi à travers des regards tiers. Parmi les textes qui jalonnent le livre et déplient à chaque fois quelque chose de l’œuvre, celui de Cécile Becker est construit sur le mode du dictionnaire amoureux où chaque entrée met en relation une citation d’un auteur dont l’univers fait écho à celui d’Ayline Olukman, avec le propos de l’artiste. Il est notamment question de la recherche de la beauté et c’est intéressant, voire réjouissant, de noter comme cette notion fait désormais sens avec autant d’évidence et de partage dans la pratique de nombreux jeunes artistes.
L’univers d’Auline Olukman est baigné de beauté pourtant sa douceur froide et sa séduction ne renoncent en rien à la possibilité d’une profondeur métaphysique souvent revendiquée autrefois par les Avant-gardes et leurs suites.