DRAWING NOW, entre photo-réalisme et pratiques mixtes

Depuis plusieurs années Drawing Now affirme son excellence dans toutes les pratiques spécifiques de dessin. L’édition 2014 bénéficiant d’un nouveau lieu d’accueil le Carreau du temple est une réussite. Ce nouvel équipement parisien est tout à fait apte à recevoir dignement foires et salons par sa situation géographique centrale et ses volumes aérés y compris au niveau inférieur. Une sélection internationale de galeries reconnues ou plus jeunes permet d’offrir un panorama très dynamique de la création graphique.

On y trouve aussi bien des dessins du Chat de Philippe Gelück mettant en perspective notre rapport fétichiste à la culture qu’une approche monographique de l’espagnol Eduardo Arroyo. Son directeur artistique Philippe Piguet rend hommage au graffiti contemporain avec une carte blanche donnée à Villeglé dans un dialogue avec les jeunes graffeurs Lek & Sowat qui leur permet de réaliser une fresque à l’espace Commines, deuxième lieu de la manifestation. Deux grandes tendances se détachent clairement, celle d’une esthétique photo-réaliste d’un dessin précisionniste souvent en noir et blanc où les artistes font preuve d’une très haute maitrise technique. Paysage et représentation humaine en sont les sujets favoris, comme le prouve brillamment les très petits portraits de Yann Thoreau ou ses grande figures d’adolescents en pied. Dans la même optique entre architecture et personnages Jurriaan Benschop dresse son Panoptique de Berlin. Une des révélations de cette foire dans ce domaine, Gideon Kiefer intervient avec très peu de couleurs pour mettre en valeur des gestes d’artisan ou des pseudo-scènes théâtrales.

Dans ces expériences très spécifiques la carte et ses avatars topographiques sont souvent ré-exploités comme par Nikolaus Gangsterer. Des pratiques citationnelles réinterprétant peintures ou sculptures célèbres restent à découvrir comme en produit Martin Assig. La galerie Laurent Godin prouve que la pratique quotidienne du dessin demeure courante, qu’elle accompagne une autre forme de création plastique chez Gérad Traquandi ou qu’elle soit à côté de la musique une expérience sérielle d’autoportraits intégrant des réminiscences d’autres visages pour le rocker Alan Vega.

La seconde grande tendance, la plus innovante explore tous les confins du dessin dans des pratiques mixtes. C’est ainsi que l’on retrouve avec beaucoup d’émotion chez Lara Vinci les collages textes et natures mortes de Jean-Luc Parant à côté des dessins plein d’humour philosophique de Miller Lévy. Chez Christian Bertch on découvre avec grand intérêt les collections de très petits dessins sériels inédits de José Johann Seinen, qui dialoguent avec les structures complexes de Lubos Plny. Luc Detot à la galerie DX qui nous avait familiarisé avec de grands portraits dessinés en réinterprète des détails en y intégrant des images anciennes collées qui constituent comme une histoire intime du portraituré. En travaillant ses dessins en couleurs sur des éditions du Monde Paul Pouvreau leur donne une profondeur troublante. Emilie Chabannes représente sur bois les grandes performances de la contemporanéité mettant en scène deux protagonistes Gilbert and George ou Ulay et Abramowic. (Galerie Stephan Stoyanov, New York).Le tremblé des différentes phases de la rencontre est ensuite remis en activité par l’attaque de la surface. Le prix Drawing Now lui-même a été attribué, à juste à titre, à Cathryn Boch qui chez Claudine Papillon présente ses ensembles de cartes, dessins, matières colorées et coutures qui donnent d’étranges sites. Fascinant.