L’été nous a offert deux occasions essentielles d’approcher le combat incessant de Gérard Traquandi avec la plus exigeante pratique de la peinture dans son dialogue avec Hans Hartung comme dans le commissariat à l’abbaye de Montmajour où il convoque des artistes alliant comme lui « la règle et l’intuition ».
C’est en 1980 à la fondation Beyeler en Suisse que Gérard Traquandi peintre d’origine marseillaise né en 1952 a l’opportunité d’une rencontre avec un tableau de Hans Hatung (1904-1989) qui lui permet de réviser son approche de l’œuvre et d’en sentir la proximité avec sa propre expérience. Il y a huit ans il évoque de nouveau cette parenté avec l’une de ses galeristes de la Côte d’azur, Catherine Issert, l’autre représentant de son travail étant Laurent Godin. A Saint Paul de Vence durant tout l’été la galerie a matérialisé cette fraternité de travail grâce à l’exposition A double détente.
L’œuvre peinte de Traquandi s’est toujours manifestée en alliant expérimentation et rigueur. S’il s’est toujours confronté à la grande histoire de la peinture il a parfois pratiqué des manières techniques variées. On ne peut que se souvenir avec émotion de ses réalisations pigmentaires de très grand format proche des usages pictorialistes de la photographie. Elles alliaient des sujets aux formes relativement simples cruches grands arbres etc à cette matière très prégnante. Son rapport à une nature toujours présente en en sous œuvre a continué d’animer son imaginaire ; qu’il agisse in situ par se dessins sur le motif ou dans le laboratoire de formes qu’est l’atelier.
Toujours préoccupé par la matérialité de son support , dans ses dernières peintures la puissance de la couleur reste essentielle bien que travaillée dans l’évanescence du peu de matière. Il arrive ainsi à une expression sublimée de la légèreté. De fait le travail sur le fond d’Hartung auquel il surajoute les résultantes d’une gestuelle importante répond bien à la manière récente de Traquandi. La double détente évoquée par le titre de leur rapprochement très parlant s e manifeste aussi dans une approche atmosphérique du monde liée à une préoccupation essentialiste du fait peint.
Dans l’exposition de l’Abbaye arlésienne il a choisi des œuvres de ses contemporains capables d’entamer un vrai dialogue avec la puissante architecture du lieu. Il a ouvert encore cette confrontation en ajoutant des objets datant de la période d’activité religieuse du lieu : moyen-âge et renaissance. Dans sa présentation il argumente sur la capacité de ces créateurs dont il se sent proche de mettre « leur économie de moyens au service d’une expression sensuelle du monde. » Là ses propres œuvres récentes font écho à celles de Giovanni Anselmo, Jean-Pierre Bertrand, Bernd Lohaus ou Helmut Federle….
La dimension internationale de cette sélection prouve que nos peintres français , à l’instar de Gérard Traquandi quand ils exercent leur culture spécifique de l ’histoire de la peinture et l’exigence de refonte dans une actualité plastique nous apportent de grandes émotion esthétiques toujours renouvelées.