Giovanni Tavano, le monde derrière les écrans du réel

L’oeuvre de photographie directe de Giovanni Tavano développée de 1977 à 2020 a connu une reconnaissance aussi bien en Italie où il est né en 1954 à Pescara qu’en France en exposition et dans des collections et il a trouvé aussi des débouchés internationaux. La monographie de grand format que la maison Corsa Edizioni lui consacre s’ouvre sur un long entretien avec l’une des critiques et historiennes italiennes du médium les plus actives dans son pays, Roberta Valtorta.

Ce livre rétrospectif de l’action de recherche en prise de vue directe de Giovanni Tavano trouve aussi son approche critique avec Arturo Carlo Quintavale et Luigi Carlucci en balance avec les éclairages français de Guy Mandery et Jean-Claude Gautrand. Les deux grands chapitres correspondent aux deux pratiques diverses, l’une analogique en noir et blanc recoupe la plus longue période et la seconde datant de la dernière décennie montre l’exercice numérique en couleurs.

Le premier corpus revendique ses relations aux domaines de l’urbain à travers ses paysages. La première photo prise de l’intérieur d’une voiture, une main floue sur le volant, face à la ligne d l’horizon d’une plage , nous invite à un voyage transalpin dont les légendes nous indiquent les étapes sous chaque illustration. Au contraire le titre du second corpus en couleurs Monde parallèle dédié à la végétation naturelle sous tend une approche non située qui ne suppose pas de légende.

Dans le premier ensemble seules cinq photos montrent des êtres humains en situation, les images d’animaux sont deux fois plus nombreuses. Ce genre pourtant facilement pourvoyeur de clichés simplistes résiste bien en fondant leur présence au décor dans un jeu de gros plans fusionnels comme dans un subtile traitement du tirage. Les dernières images les plus nombreuses, bien que toujours référencées par leur légende à une ville italienne, concernent directement une nature péri-urbaine. Un motif naturel ou un fouillis végétal y occupe le premier plan en faisant écran au reste de l’espace.

Cette structure se généralise dans le second portfolio, le plus convainquant dans son approche esthétique globale. Les plans sont serrés, un motif de plante, de variante florale, de fruits ou d’ éléments arborés occupe le premier plan.Une intense lumière naturelle ou un coup de flash se focalise sur leurs formes et dynamise leurs tonaités. Ils se détachent d’autant mieux du fond que la profondeur de champ reste peu importante. Si l’auteur peut à juste titre évoquer un monde parallèle c’est à la fois dans cette construction de quasi all over saturant le cadre mais surtout dans l’exacerbation des couleurs qui prennent un caractère irréel.