Formé aux Beaux-Arts, co-fondateur et éditeur d’Images En Manœuvres Editions 1986-2013, Arnaud Bizalion Editeur (ABE) est spécialisé en photographie et arts visuels. Monographies, autobiographies, récits, reportages, poésies, journaux, écrits politiques et philosophiques, textes et photographies représentent un axe fort et ouvrent sur des champs connexes dans des expressions d’une grande variété. Crée en 2014, la maison d’édition compte à ce jour plus de 70 titres.
Une situation économique extrêmement fragilisée ?
Arnaud Bizalion – Les (petits) éditeurs indépendants ont l’habitude de vivre avec le risque, car leurs projets sont très rarement économiquement viables sans des soutiens tels que : expositions, festivals, pré-ventes, souscriptions, aides à l’édition, … et le soutien du diffuseur-distributeur (Cedif-Pollen) et du réseau de librairies réparties sur l’ensemble du territoire français et pays francophones. Il s’agit d’un équilibre très fragile, qui tient à un ensemble de dispositifs. Une chaîne de professionnels impliqués et solidaires, mais fragile comme un château de carte !
La pandémie a soudainement barré le flux des échanges : librairies fermées, expositions annulées ou reportées, festivals supprimés, .. Plus de lieux de monstration, plus de ventes !
Et des factures à payer (en-cours de production, charges fixes) à des échéances très courtes.
Les livres dont les parutions étaient prévue en mars et avril, sont reportées à fin mai et juin. Et le décalage va repousser ainsi les publications, donc un encombrement fatal dans les librairies. L’état et les Régions ont mis en place des aides, ou sont en train de le faire avec des critères multiples, car chaque cas est particulier. Qui pourra en bénéficier, saupoudrage parcimonieux ou sélection arbitraire.
Quelles précautions avez vous prises pour répondre aux menaces sur le secteur ?
AB – Pour répondre à la menace annoncée, de nombreux projets éditoriaux sont reportés, dans l’attente d’un redémarrage de l’ensemble des maillons de la profession.Beaucoup de projets sont revus à la baisse pour s’adapter au mieux aux nouvelles données. Mais comment se protéger de l’in-maîtrisable ?
Quelles sont les collections qui marchent le mieux ?
AB – « Collections » est un terme qui ne correspond pas à ce qu’ABE a entrepris de construire à travers ses publications. Il y a les publications « d’albums », ouvrages monographiques, où la rencontre est visuelle avant tout, accompagnés de textes d’auteurs au diapason des photographes, et il y a des voies ouvertes sur des champs connexes à la photographie tels que biographies, philosophie, sociologie, histoire, pratique, … Ces ouvrages sont généralement « illustrés », et le texte y occupe une place au moins équivalente. Les ventes se trouvent équilibrées entre les différents ouvrages, répartis sur des gammes de prix allant de 17,50 € à 38€.
Quels sont vos livres phares ?
AB – Si l’on parle de « livre-phare », il faut tenir compte des paramètres propres à chaque titre : notoriété de l’auteur, intérêt du sujet, accompagnement médias, prix, format, nombre de pages, …
On ne peut donc pas mettre tous les livres sur le même niveau. Les tirages moyens se situent aujourd’hui à 700 ex, ce qui veut dire 1200 ex pour certains, et 200 ex pour d’autres.
Pour l’année 2019, l’ensemble des titres a trouvé son équilibre dans des ventes en rapport avec leur tirage. On peut citer ainsi Une amitié avec Willy Ronis, AUTO Edition photographique de Céline Ravier, Le Tendre espace de Frédérique Dimarco, Venise et ses îles de William Guidarini, Exils-Réminiscence de Christine Delory-Momberger, Mise au point de Didier Ben Loulou et Fabien Ribery, …
Quels sont vos projets dans les 6 prochains mois ?
AB – Dans cette période aussi trouble et incertaine, la vision est brouillée, il est donc difficile de faire une mise au point et un prévisionnel toutefois, le format de la (petite) structure ABE permet une très grande souplesse, et une adaptabilité au nouveau biotope qui se dessine. Des projets sont en cours et les publications seront au rendez-vous des attentes des lecteurs.
Quelles sont vos rapports avec les diffuseurs et distributeurs ?
AB – Les diffuseurs et distributeurs sont des maillons indispensables de la chaîne éditoriale. Nos relations plus que jamais sont renforcées, permanentes et complémentaires.
De la commercialisation d’un titre à son acheminement chez les libraires, en passant par la gestion des stocks, les relations sont étroites et soutenues.
Attendez vous une réaction et de l’aide du Ministère de la Culture ?
AB – Nous sommes en relation avec le MdC, il est à l’écoute de nos difficultés, nous attendons un soutien financier dans des échéances brèves pour nous permettre de faire front aux difficultés économiques et tenir la tête hors de l’eau.
Qu’attendez vous des critiques d’art ?
AB – Leur rôle est essentiel ! C’est à travers leur regard sensible et distancié que les nombreuses publications peuvent permettre au public de faire des choix et aux auteurs d’être présents sur la scène, et mis en lumière.
Comment percevez vous vos lecteurs et leur évolution ?
AB – J’aime mes lecteurs ! Ils sont attentifs aux titres et aux auteurs publiés. Leurs achats et leurs retours sont des encouragements précieux.
Ils sont friands des nouveautés et apprécient la direction éditoriale ouverte et sensible au temps présent.
Comment vivez vous le rapport aux bibliothèques ?
AB – Je n’ai pas de relation directe avec les bibliothèques, mais je suis heureux de savoir que mes publications retiennent leur attention.
AB – Comment envisagez vous le rapport papier / électronique ?
Question à reformuler , néanmoins je compte très peu de publications en version numérique.