Au commencement la beauté

Les découvertes successives de l’art pariétal dans des grottes (en premier lieu celle de Lascaux, puis Chauvet) nous ont contraint à modifier radicalement les présupposés d’une histoire de l’art chers au positivisme évolutionniste du XIXème. L’art paléolithique dessine dès l’origine l’intemporalité perturbante d’une parade sauvage et splendide. Le mythe d’un progrès de l’art s’effondre.

La préhistoire ne nous présente rien qui ressemblerait à un commencement archaïque : “ la peinture est en décadence depuis l’art des cavernes” (Miro).
François Warin, qui s’est intéressé aux arts dits “premiers”, avait étudié Bataille en ce qu’il a de nietzschéen, lequel Bataille écrivit en son temps un livre magistral : Lascaux ou la naissance de l’art (Skira, 1955). Cet essai illustré, bref et suggestif, considère que l’anthropogenèse s’enracine dans l’art en esquissant une anthropologie philosophique proche de celle que l’on trouve dans le bel éloge de la main de Henri Focillon.

Situées à mi-chemin des traces et des signes, les figures magnifiques peintes sur les parois des grottes nous appelent. L’art paléolithique semble inséparable d’une religiosité fondatrice, d’une pensée magique presque antérieure au langage donc à l’attribution d’un sens : “Forme n’est pas sens… ce qui nous libère du fardeau des interprétations”. Même si, par souci d’érudition et volonté de clarté, l’auteur les énumère volontiers (pp. 58-59). Le philosophe se doit de descendre dans l’obscurité inquiétante de ces prometteuses cavernes parce qu’il se soucie du primitif qui nous concerne encore intimement lorsqu’il est pris au sens de la scène primitive : celle qui nous a fait naître.