De la cueillette au tressage végétal en installation

Marinette Cueco, née en 1934 en Corrèze s’est fait connaitre, comme une des figures françaises de l’art textile avant de faire évoluer sa pratique vers un lien exclusif à la nature et à ses matériaux.Le Musée de l’Hospice Saint-Roch d’Issoudun lui consacre une vaste exposition « Hypothèses végétales » dans ses quatre salles d’accrochage temporaire. L’association Devenir art lors d’une de ses navettes mensuelles en Centre Val de Loire organisait à l’occasion du vernissage une visite faisant suite à la Biennale d’Architecture de Vierzon dont nous reparlerons. La rigueur de l’accrochage met en lumière la logique et la continuité plastique dans cette oeuvre sensible réunissant ici des oeuvres conçues entre 1991 et 2022.

Dès les années 1960 Marinette Cueco s’est consacrée au tissage et à la tapisserie auxquels elle a redonné une nouvelle visibilité. Dans la décennie suivante elle entame récoltes ou plutôt ses cueillettes d’éléments végétaux et minéraux qui deviennent la matière première de ses créations. Le tressage en entrelacs de plantes graphiques assure la continuité avec ses premières pratiques. Entre tableau et sculpture murale ces oeuvres aériennes sont visuellement très fortes. Itzhak Golberg en saluait ainsi la forme :
« Marinette Cueco écrit avec les herbes un langage abstrait, une calligraphie très sensible qui exalte la spécificité de chacune »

Le support attendu pour l’organisation de ces élément végétaux récoltés est naturellement l’herbier. Le cabinet d’art graphique nous donne à voir les 11 premières éditions de ses livres d’artiste qu’elle appelle des Herbailles. D’autres réalisations du même orde mais en plus grand format sont accrochées. Le même élément naturel y est disposé dans une continuité visuelle qui les organise de façon sérielle. Pour chaque oeuvre finalisée l’artiste réalise des dessins préparatoires détaillés, dans lesquels les noms de chaque plante sont placés en regard des lieux de leur trouvaille.

Revendiquant ses gestes comme hérités d’une culture paysanne et d’une pratique étendue du jardinage elle utilise toutes les parties des plantes cueillies (graines, pétales, feuilles, tiges, épluchures… pour les agencer en de minutieuses et fascinantes compositions. elle opère aussi d’autres formes de sculptures minimales. Elle sélectionne des pierres sur les chemins puis, en nouant et tressant de délicates résilles végétales elle les emmaillote opposant leur pérennité à cette protection plus éphémère.

Son mode opératoire respectueux des cycles saisonniers ainsi que son usage exclusif des plantes et des minéraux, la rend proche de certains de ses contemporains, comme Richard Long ou Herman de Vries. C’est notamment sensible dans ses réalisations in situ et ici dans ses installations au sol, dont cette oeuvre produite pour le Musée intitulée Pelotes et Débris.On retrouve ici une de ses formes fétiche la pelote, à côté de de la boule, ou du fagot.

Marinette Cueco inaugure un rapport à la nature considéré comme une forme respectueuse de collaboration. L’énergie qu’elle développe est restée la même depuis les débuts de son oeuvre, cette exposition en mêlant des oeuvres de différentes époques prouve cette qualité de pensée et de création trop rare.