L’Eglise de la Madeleine à Paris accueille tout l’été sa première biennale « Les stèles de la création ». C’est l’occasion de s’attarder sur deux sculpteurs dont les travaux apparaissent aussi singuliers que complémentaires Faz et Oddoux.
On doit savoir gré au Père Ponsard d’avoir accueilli dans ce même lieu pour une « Nuit blanche » il y a trois ans une œuvre vidéo d’une haute exigence spirituelle et artistique de Bill Viola. La sélection globale reste par contre ici beaucoup plus inégale, même si les sujets à caractère religieux abondent. De même seule la charité chrétienne, de mise en un tel lieu, nous retient d’évoquer plus avant la néième grandiloquence creuse d’un de ces artistes politiquement proche du pouvoir dont les pièces apprécient les plus riches places parisiennes.
Deux œuvres nous invitent au contraire à comprendre comment l’alliance d’un projet exigeant et d’une implication de tout l’individu, homme ou femme fait toute la différence et nous interpelle au plus profond de notre être.
Christian Oddoux est psychanalyste, ses œuvres manifestent une écoute non flottante des douleurs pas toujours verbalisées, parce qu’universellement partagées. Si ses orants encapuchonnés appartiennent autant à un haut moyen-âge qu’à sa revisitation par tout un imaginaire du cinéma d’horreur, ils assument dans la crypte de la Madeleine leur rôle de gardiens de la parole ou du drame des corps plongés dans l’histoire des siècles.
Ses gisants eux sont bien d’aujourd’hui dans la tension de la douleur, comme dans le mécano de l’inconscient ici retendu entre bois et métal. Par delà leur héritage maniériste des écorchés de Ligier-Richier ils ont la puissance dramatique de tous les charniers du XX° siècle qui les fondent.
Faz est femme avec sa tête comme avec son cœur. Les cœurs elle les fait tourner dans ses sculptures qui jouent de l’élancement et d’une énergie mise en action suivant des hélicoïdales empruntées à la chimie.Ce qu’elle sculpte c’est avant tout la relation, non la femme en tant que sujet, mais ses liens à son histoire, à sa sensibilité.
En tant qu’homme ses œuvres suggèrent l’enlacement, elles exigent l’effort conjugué des épaules et des avant-bras sans recours à la force, c’est elle qui la maîtrise, mais à une participation en empathie.
Pour les femmes ces œuvres ne se veulent pas seulement miroir, elles convoquent leur sensibilité dans une solidarité d’exigence en recherche de maternité.
Grâce à l’élégance de ses matériaux comme à l’épure de ses lignes Faz tente une alchimie contemporaine des passions
Les deux œuvres manifestent un baroque contemporain qui prend ses pitances formelles aussi bien aux sciences exactes qu’aux sciences dites humaines en flirtant avec l’histoire des formes et celle des arts.