Exposition Paysages productifs de Nicolas Floc’h

Nicolas Floc’h s’intéresse aux habitats des milieux marins et aux paysages sous-marins en menant des projets sur des temps longs pour aborder les enjeux liés à la transformation des mers et des océans. Ses rencontres avec les scientifiques nourrissent sa réflexion et ses expériences artistiques. Il explore différents territoires afin de mettre en place des scénarios de projets. La photographie, la sculpture, la peinture et la performance sont convoquées dans ses œuvres in process.

Au FRAC Paca à Marseille, il réunit trois projets sur divers espaces et temporalités de création. Au rez-de-chaussée, il présente sa série Invisible débutée en 2018 consacrée au paysage sous-marin des calanques de Marseille. Son travail sur les habitats artificiels l’a amené à travailler sur les habitats naturels. Il a constaté que ces habitats naturels étaient peu représentés et a souhaité mettre en évidence leurs évolutions rapides et visibles. Ce parc fut une zone laboratoire où il a observé la transformation du paysage. Ses photographies noir et blanc sont ici disposées le long d’une ligne qui suit le littoral. Ce qui offre une continuité de lecture du territoire exploré. Il photographie en grand angle et en lumière naturelle lors de plongées afin de constituer un inventaire de ces paysages qui s’étendent sous le regard. Une carte permet aussi de relier ses photographies aux endroits précis où il a plongé.

Son travail photographique relève d’une performance et d’une recherche au long cours accompagnée d’une équipe de scientifiques. Le noir et blanc ouvre l’imaginaire et rapproche ses images d’autres territoires et milieux.
Ses tirages renvoient également à l’histoire de la photographie de paysage et aux commandes qui consistaient à restituer un état des lieux d’un territoire. L’artiste s’éloigne des représentations habituelles des fonds marins. Nous pouvons suivre son parcours et s’arrêter sur les images qui attirent notre regard et nous incitent à nous interroger sur les particularités de la Méditerranée, mer impactée par l’urbanisation des villes qui la bordent. Ses photographies (fichiers bruts) sont ensuite confiées aux scientifiques avec lesquels il a travaillé ; elles peuvent alors avoir d’autres usages que leur présentation dans le cadre d’expositions. Nicolas Floc’h constitue ainsi un inventaire de photographies de cette zone littorale à un moment donné et contribue à la recherche scientifique.

Au centre de cet espace et au milieu de ce parcours photographique, il a installé son travail lié à la couleur de l’eau. Telle une coupe dans les masses d’eau, ses images révèlent les caractéristiques de la mer au fur et à mesure des transformations qu’elle subit. La couleur est déterminée par les phytoplanctons et les phyto-algues ainsi que les matières organiques et celles inorganiques dissoutes. « La couleur est un indicateur sur le cycle du carbone, l’état des eaux, sur le climat » précise l’artiste. En s’approchant, nous pouvons découvrir les éléments du fond marin, la vie dans ce milieu. Deux niveaux de lectures d’un paysage se complètent ainsi. Si la couleur est extraite dans ses photos de milieux sous-marins, elle apparait dans celles de la série autour de la couleur de l’eau, qui fait écho au monochrome pictural.

À l’étage, Nicolas Floc’h dévoile une étape d’un projet photographique, financé par la Fondation de France, centré sur le littoral breton, intitulé Initium maris. Il semble difficile de saisir véritablement l’échelle des espaces et des éléments végétaux captés en photographie. Ses images peuvent avoir plusieurs lectures possibles. Une sculpture de récifs artificiels est également présentée et crée un lien avec certaines images installées en rythme sur les murs, dans un accrochage plus éclaté. Des parallèles s’établissent entre les territoires qu’il photographie.

Il a conçu la scénographie de cette exposition de façon à nous plonger dans un milieu plus ou moins sombre et ses images peuvent, selon le moment de la journée, se refléter au sol. Les vitres qu’il a fait teinter créent des halos de couleurs de l’eau dans les espaces. Ce qui relie les différents milieux sous-marins où il a plongé.

L’artiste nous invite à comprendre qu’un phénomène peut s’étendre dans un plus vaste écosystème. Ses photographies montrent ce qu’on ne voit pas dans ces paysages sous-marins, les effets de l’acidification et sa conséquence, l’effondrement de la biodiversité. Sa démarche, son engagement envers les évolutions des paysages marins et océaniques nous incitent à porter notre attention sur les impacts du réchauffement climatique et de la pollution, qui perturbent ces habitats d’espèces animales et végétales.