Il est toujours intéressant d’assister au dialogue d’artistes contemporains avec des collections muséales mais on attend des conservateurs ou des curateurs qui encouragent ce type d’initiative un réel travail de mise en perspective. La programmation du Musée de Gap en cet été 2017 procède d’une rare confusion. On y célèbre l’année Lesdiguières et … Buffalo Bill, on y montre les animaux naturalisés et une invitation est lancée au FRAC PACA. Le nouveau parcours de visite se place sous le prétexte fort général « Entre-Temps ». Dans ce parcours chaotique des artistes réussissent cependant à émerger.
Ils utilisent des techniques fort diverses et recourent à des esthétiques tout aussi divergentes. Du FRAC on est toujours intéressés à revoir des pièces photographiques de Natacha Lesueur, une vidéo interrogeant le vêtement de Marie-Ange Guilleminot, des aquarelles urbaines d’Yvan Salomone ou un ensemble de petits tirages repeints par Philippe Cognée qui rejoignent dans leur approximation les encaustiques chauffées qui l’ont rendu célèbre.
En revanche le visiteur ne doit pas chercher à élucider la différence faite par les commissaires entre ce qu’ils réunissent comme « Rappel » ce qui se regroupe en tant que « Paysage(s) » et ce qui mérite l’augmentatif « Tant » (sic) . Il peut alors apprécier la façon dont Michel Barjol travaille lui aussi des peintures sur support argentique pour leur redonner une matérialité nouvelle. L’intensité des œuvres en zinc de Pascal Catry provient du détournement paysager qu’il opère de leur érosion par les intempéries. L’ensemble le plus émouvant est dû aux « Pluies noires » de Fukushima. Sophie Menuet une artiste de la région présente différentes œuvres dans plusieurs espaces. Une armure de tissu laineux semble rendre hommage plus à Beuys qu’à Lesdiguière ! Elle arbore pour des auto-fictions de complexes masques de tissu qui répondent à ses vanités sculptées en soie. Dans des vitrines de petites sculptures bien que référencées dans leur titre à l’animalité trouvent une violence feutrée qui nous rappelle certaines petites pièces de Louise Bourgeois.
Quand on découvre les vidéos de Bertrand Gadenne et notamment l’installation de son « Cochon » qui diverge de ses pièces plus épurées comme « La langoustine » on se souvient certes d’avoir vu trois niveaux plus bas ses congénères empaillés, mais ce n’est encore une fois pas pensé ou scénographié.
La technique comme les sujets de Nicolas Daubanes n’ont rien à faire avec l plupart des autres œuvres. Son univers carcéral est parfaitement mis en valeur par son utilisation de la poudre de fer aimantée. Si un dialogue était possible il s’instaurerait avec les photographies de Florent Mattei, deux étages plus haut. Bien que relevant de mises en scènes inspirées de la méthode Jeff Wall elles réussissent à instaurer une relation vraie entre corps masculins et espaces d’une violence péri-urbaine. A partir de la ville ou plutôt de ses constructions en déshérence Max Charvolen organise quant à lui ses prélèvements muraux pour une abstraction domestique dessinée.
Avec une technique classique du dessin de haute précision Michel Houssin recrée un monde ou le microcosme d’un front ridé comme « Paysage de vie » répond au macrocosme d’une « Foule » élaborée tout au long d’une année pour que les prémisses encore informes du haut du tableau deviennent une nuée de portraits très singularisés dans e bas du cadre.
Décidément les grandes œuvres résistent à tous les aléas d’accrochages aussi improbables soient ils.