IL, ce sont tes initiales Isabelle Lévénez

Isabelle Levenez vient de mettre fin à ses jours , Isabelle de Maison Rouge ,
auteure, critique d’art (secrétaire générale d’AICA France) curatrice et historienne de l’art préparait une exposition avec elle dont l’artiste ne voulait pas être co-commissaire bien qu’elle en soit l’initiatrice.
L’expo « femmes guerrières, femmes en combat » regroupe une douzaine d’artistes, exclusivement féminines , elle se tiendra pour le 1° volet à la Topographie de l’Art en septembre 2021 pour 2 mois. 

« C’était vraiment la matière vidéo qui m’intéressait et cette chose unique qu’elle offre de pouvoir restituer la présence d’une personne par l’image, de se retrouver face à elle en son absence physique » … c’est exactement ce que tu nous laisses Isabelle, ta présence en ton absence et tes mots résonnent particulièrement maintenant que tu es partie.

Tu as aimé avec passion et par-dessus tout, la poésie, avec elle tu nous as emmené en voyage, le voyage d’hier et celui de toujours.
« D’ouïr tout le ciel et la carte
Sans fin attestés sur mes pas
Par le flot même qui s’écarte,
Que ce pays n’exista pas. »
Ce quatrain de Stéphane Mallarmé, extrait du Poème Prose pour des Essences (1884), tu l’avais pris comme programme-création.
IL, ce sont tes initiales Isabelle Lévénez.
IL, pronom personnel dont tu usais en début de phrases, d’exposition en exposition
Il possède en lui le silence vide 
IL se penche en avant et peu à peu son corps quitte l’image
IL écoute le bruit sourd de la chute de l’image
IL chute dans le silence de l’image
IL regarde jusqu’à s’effacer
IL s’enferme dans un paysage intérieur
IL s’accroche à l’image
IL bascule hors du cadre
IL efface un lieu
IL observe en silence la chambre d’attente
IL aime traverser un monde de silence
IL, tu nous a montré, recopié, dit, psalmodié et filmé le voyage autour de ton crâne qui n’a ni début ni fin et nous révélait la surface et ses dehors dans un bruit blanc étourdissant.

Fil conducteur depuis tes débuts, le récit fictionnel de l’identité et de l’altérité dont la présence du corps reste centrale, annonce le combat à mener face à la dématérialisation programmée du corps physique qui se laisse percevoir dans tes œuvres inquiètes, singulières à fleur de peau et en profondeur. Elles nous expriment toute la générosité qui t’animait.
Dessins, dessins autour du texte, écritures, poésie visuelle, photos, vidéos et installations, l’usage de médiums variés relevaient de la manière dont tu envisageais ta pratique en fonction de ce que tu avais à exprimer.

Un des tes dessins à l’aquarelle de 2012 nous disait « Je t’offre le souffle de ma vie ».

IL, tu t’en es allée dans les ténèbres mais ta trajectoire d’étoile filante nous laisse dans les yeux et le cœur la fulgurance de ta lumière.