Le Centre National de l’Audiovisuel du Luxembourg installé à Dudelange a consacré une exposition rétrospective à Michel Médinger au dernier trimestre 2018 dont l’institution possède plus de 200 oeuvres dans sa collection . Un important livre cartonné en constitue le catalogue sous le titre « Les univers photographiques de Michel Médinger ».
Pour approcher cette recherche plastique d’une haute exigence un long dialogue entre l’artiste et l’éditrice du projet Marguy Conzémius retrace l’élaboration du travail de toute une vie. Né en 1941 Michel Médinger a commencé par une pratique picturale très fondée sur la couleur. Il a aussi une vocation de collectionneur d’objets manufacturés, d’outils mais aussi de squelettes d’oiseaux, de fruits et légumes anthropomorphes et d’éléments traditionnels de la nature morte :crânes, mouches et fleurs fanées. Avec tous ces éléments disparates il crée des agencements à l’aide de boîtes et de cadres qu’il photographie en studio en noir et blanc. Grand amateur du laboratoire photographique il développe ses tirages et expérimente toutes sortes de pratiques telles la solarisation , les virages au sélénium ou au platine mais aussi le Polaroïd et le cibachrome tant qu’ils ont été commercialisés. Revendiquant les différentes étapes de sa création qui élaborent l’ensemble de ses recherches il se réclame de la Slow Photography, cette pratique où il se pose autant de questions édifiées autant dans la peinture que la sculpture lui a permis d’être depuis fort longtemps défendu par la galerie Clairefontaine de Luxembourg.
Contrairement aux éditeurs, Klaus Honnef dans sa préface préfère mener son analyse au singulier : « Michel Médinger et son univers ». C’est que le critique d’art s’attache à dépasser une certaine diversité des multiples séries expérimentées par le photographe durant ses 40 ans de pratique, pour montrer une même attitude devant le monde qui se manifeste par un art qui subvertit les catégories installées.
Pour les nombreuses photographies en couleurs il s’attache d’abord à des sujets du quotidien clichés dans une grande proximité. Façades, boîtes à lettres, baraques de chantier et surtout vieilles pompes à essence sont reproduites dans une frontalité presque documentaire. Leur position centrale dans l’espace du cadre se retrouve dans les installations mises en scène de son cabinet de curiosités contemporaines. Certains rapprochements d’objets manifestent un esprit néo-surréaliste qui n’est jamais dépourvu d’humour. Cela peut permettre par exemple à l’auteur d’exprimer sa version personnelle de la trinité dans une image de 2014 qui montre un christ saint-sulpicien tenant dans ses mains une burette d’huile 3 en 1.
Klaus Honnef commence son analyse critique par une étude d’une image de 2013 qui se trouve en avant-dernières pages de l’ouvrage. Cette Réflexion sur Darwin réunit un écorché d’un cerveau humain, une figurine de petit singe faisant face à à un crâne humain fiché sur une tenaille. Elle montre l’intérêt de Médinger pour les approches philosophiques, pour les grandes questions telles que la mort, la nostalgie, l’érotisme et la condition humaine traitées avec une grande légèreté. Le livre se clôt sur un polyptique de 9 images, datant de 2001, et titré Petite balade à travers la vie qui passe, il constitue une sorte de panoramique d’atelier lisible de gauche à droite qui mêle dans une dynamique formelle tous les éléments de son vocabulaire plastique des fleurs aux outils réappropriés.