Du temps retenu dispersé en surface de l’image, pas même de l’événement, quatre artistes explorent ces infra-couches temporelles rythmées par des présences humaines à éclipses et jusqu’à leurs moindres traces.
« La Mire » le titre de ce lieu alternatif orléanais qui a repris les initiatives de la défunte association « Lumen » m’évoque les écrits de Bdernard Lamarche-Vadel sur la photographie. Dans ses « Lignes de mire » il défendait comme nous le rappelait l’excellente exposition à lui consacrée au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris des « seuils de vision ». Les personnages saisis par Emmanuelle Duron-Moreels dans de hiératiques attentes aux frontons du quotidien ont gardé ce parfum visuel de franchissements impossibles.
Si le travail photographique de Valérie Jouve défendu par la galerie Xippas est fort connu il est heureux qu’elle accepte de représenter ici son premier film documentaire « Grand Littoral » tourné à Marseille en 2005.
Ces réalités urbaines aidées sont montées en des suites de plans rapîdes, scènes à peine accélérées de présences passantes, plans larges et ralentis d’occupations humaines des sols.
Dans cette intelligente proposition deux œuvres s’affirment ici pour moi comme des révélations. Karine Portal se donne pour tâche de cerner les « corps impossibles, portraits et paysages s’y emploient mêlant leur force de présence épiphanie. Tel ce fumeur vu en sombre plongée de ¾ dos ils échappent au cadrage par trop carré. Ils s’agitent moins du fait d’une impossibilité de vivre leur présent que d’un trop de présence au monde qui sature leur espace.
Les boucles lentement parcourues des vidéo d’images numériques de Thomas Léon constituent la seconde belle surprise de cette exposition. Du lent parcours pénétrant la perspective d’un village générique en construction noyé sous le gris d’une neige de synthèse nous passons dans le même travelling à des matières de sols. Les « hautes latences » revendiquées par le titre ne sont pas qu’héritées des recherches physiques les plus pointues , elles qualifient également notre type de regard.
La régulation des temps se fonde ici sur de réglages infinitésimaux des présences humaines, là se jouent les dérèglements imperceptibles des temps de latence et de présence au monde.