La dimension critique du réseau

Revue d’art depuis 2006

Le design objet des paysages dessinés de Frédéric Messager

Frédéric Messager expose dans cet espace singulier qu’est la Borne qui tourne dans les villes de la région Centre et dans le nouvel espace de l’association du Pays Où le Ciel est Toujours Bleu à Orléans une double proposition de dessins « précaires », organisés en volumes qu’il réunit sous l’appellation « en l’état ».

Si on les redéployait ces œuvres denses apparaitraient comme de longs rubans de papier, certains de plusieurs mètres, recouverts de dessins sur leurs deux faces. Les motifs méticuleusement tracés , graffés en noir et blanc ou développés en hautes couleurs entrent en dialogue par la multiplication des opérations manuelles que l’artiste fait subir au support.

Les papiers sont pliés, déchirés, contraints de garder la forme temporaire par des pinces ou des tenseurs qui ne se cachent pas. Ce n’est qu’au second regard que l’on prend conscience de ces traitements moins iconoclastes qu’il n’y paraît. Jamais les gestes opérés ne semblent relever d’une vraie violence , reproche-t-on au potier de travailler sa terre ?

Grâce à cette énergie à l’œuvre, de nouveaux équilibres se font jour sous l’action de cet « arpenteur attentif » comme le revendiquait une de ses expositions personnelles : traits et couleurs éclatent sous nos yeux et dynmaisent les formes qui semblent avoir subi quelque soulèvement géologique.

La Borne est un mobilier urbain conçu par l’architecte Bertrand Penneron pour rendre l’art visible au grand public qui ne fréquente pas galeries, musées ou centres d’art. Dans le container actuellement installé devant le théâtre d’Orléans la distance rend ces sculptures dessinées plus organiques. Dans le sous-sol du nouveau lieu de l’association POCTB notre regard voyage à l’aise dans les infractuosités minutieusement scriptées, une sensualité semble sourdre des multiples couches de papier, nous incitant à retrouver le geste initial surgi de l’atelier.

Bien qu’il puisse apparaître simple et pour tout dire fait de main d’homme, pour ne pas dire bricolé, ce travail ludique relève d’une vraie maîtrise qui refonde nos habitudes de lecture du dessin devenu objet de paysage, attitude tout à fait contemporaine qui rend cette pratique si riche de nos jours.