Le musée d’Aquitaine s’inscrit en 2008 dans le parcours du Bus de l’Art Contemporain en invitant des artistes à dialoguer avec les collections du musée. Francis Viguera, artiste plasticien, présente à cette occasion un choix de sculptures auprès de pièces emblématiques du musée, dans une construction dialogique. Le visiteur grâce à ce lien tissé entre le passé et le présent, a une relecture des collections, et une rencontre inédite avec l’œuvre de Francis Viguera.
Francis Viguera est originaire de Dordogne, il étudie les Arts plastiques et enseigne pendant 12 ans l’Histoire de l’art. Passionné par l’art religieux qui représente la majeure partie de la production artistique, le profane n’atteignant ses lettres de noblesses qu’à partir du XVIII ème siècle, il se consacre depuis 1996 à sa carrière d’artiste plasticien : il travaille sur l’idée de la religion métaphore de l’art. Sa première exposition « Caetera desiderantur » signifie « le reste manque », il y met en scène un travail sur la religion, métaphore de l’art.
Sa première rencontre est celle d’un homme avec la matière. Il utilise des cageots de fruits et légumes et particulièrement une marque « Génesis », venue d’Espagne, qu’il trouve au hasard d’une promenade autour du marché des Capucins. Ces cageots empilés sur le trottoir, le nom de la marque… Il décide d’autopsier ces emballages et de leur faire raconter une histoire. Génésis c’est la genèse. Travail de la polysémie, il compose à partir de ces cageots un retable « Suprema céleste » qui sera le tableau qui ouvre l’exposition Resurectio : « j’ai considéré les cageots pour leurs couleurs, les agrafes, les angles, le fond. Je les ai recomposés, manipulés… ». Le cageot devient tableau religieux, un polyptyque du Moyen-Age. Les volets fermés, le retable était dans des tonalités dites « grisailles ». Lorsqu’on les ouvrait, le panneau central représentait, dans une volonté didactique, la promesse d’un paradis céleste où éclataient les ors et les couleurs chatoyantes. Le volet gauche représentait souvent la création du monde. Francis Viguera y dispose les marques de cageot « Génésis », « Désir de fruit », « Nous deux »… autant de marques évoquant la genèse et le Jardin d’Eden. Le volet de droite évoquait la chute, la promesse des Enfers, il y empile des agrafes rouillées. Francis Viguera croit à la symbolique des objets. L’or du retable est constitué de couvercles de boïte de conserves dorées. L’œuvre s’intitule : « Retable suprema céleste ». Pour lui, la religion peut être une métaphore de l’art, et de l’art contemporain en particulier.
« Le Veau d’or », thème biblique par excellence, a une résonance contemporaine. Il symbolise la passion pour les biens matériels et la cupidité. Squelette en bois de palette, pelage en couvercles de conserves dorées. L’artiste ne se considère pas comme un homme de la récupération, mais de la résurrection : « ces emballages perdus survivent au feu, ces bidons d’huile, ces boîtes de conserves, ces cageots, j’en fais mon miel. »
Dans le cadre de cette exposition, il renoue avec la sculpture babylonienne, l’art gréco-romain, la sculpture figurative. La confrontation avec les collections du Musée d’Aquitaine lui ont permis de renouer avec ces formes de sculptures.
« La Sainte Tenaille » et « Le Saint Marteau », outils de la Passion, placés dans un reliquaire doré sont les œuvres majeures de sa démarche artistique, puisque ces outils sont ses pinceaux. Sa palette d’artiste plasticien sont les couleurs et les matériaux de tous les emballages perdus qu’il utilise.
« Le taureau d’or » et « Le taureau de fer » ne sont pas sans faire penser aux dessins des grottes de Lascaux, mais aussi aux fresques de la civilisation minoenne.
Tout en s’inscrivant dans l’histoire du sacré, de l’antique, la polysémie des œuvres de Francis Viguera en font une œuvre belle et contemporaine.