Les héliographies ombragées d’Akira Inumaru

Akira Inamuru est un jeune artiste né au Japon en 1984, pour son exposition au Jardin des Plantes de Rouen, Alin Avila publie avec ses éditions Area son catalogue « Le portrait des plantes » sous titré « Distillations Solaires ». On y retrouve ses œuvres hautes en couleurs créées avec des pratiques mêlant photographie, peinture et performance.

Le livre s’ouvre sur un entretien rencontre avec le plasticien grec Jason Karaïndros qui nous informe sur la diversité des opérations techniques complexes qui aboutissent à ces œuvres mixtes. La photographie occupe souvent une place première dans ces recherches. Akira s’y réfère dans ses protocoles premiers. Ceux qui ont contribué à son invention. Travaillant la lumière dans son cadre naturel il recrée l’antique chambre claire, la camera lucida. Dans le brassage d’idées qui précède l’invention officielle de 1839 le terme qui est proposé par Niepce et qui sera utilisé dans les premiers temps sera l’héliographie. Akira Inumaru utilise lui aussi la lumière solaire pour brûler d’abord les ombres dessinées. En cela il inverse la logique négatif / positif qui procéda à l’invention elle-même.

Les pionniers de la photographie ont souvent eux aussi utilisé des éléments naturels pour en garder la trace, par l’héliographie et son mélange de vernis photosensible et de méthode en taille douce. En titrant Le portrait des plantes l’artiste se place dans leur postérité. Il choisit celles qui présentent les formes les plus alambiquées, les plus baroques, fuchsia, orchidée, cyclamen ou bruyère. A travers leur diversité formelle se manifeste de façon complémentaire une volonté taxinomique, qui prend effet dans la réalisation de séries. Comme ces pionniers il revendique d’avoir apprivoisé le soleil.

Parmi ses principales références revendiquées on trouve d’abord Yves Klein et ses « peintures de feu » de la dernière année de sa vie qui ont permis à Akira d’exposer aux Archives de l’artiste. Comme lui il s’intéresse à cette transformation essentielle où la réalité invisible devient visible. Si l’on recherche à l’intégrer dans une famille d’artistes on doit y faire figurer le suisse Christian Jaccard formé comme graveur chromiste dans une imprimerie typographique. A ses œuvres mixant nœuds et combustion correspondent les mélanges photo-dessins et distillations solaires. On peut aussi rapprocher l’ensemble de photographies en couleurs Les Dormeurs, de 2003 travaillant les formes nouées jusqu’à leur disparition en cendres à la série reproduite ici des Ignis Fatuus montrant des fleurs en auto-combustion.

Les préoccupations sérielles comme la volonté de conservation des plantes et fleurs devaient justement trouver une forme d’archive, l’herbier évoqué aussi comme jardin sec, en était un aboutissement logique. S’appropriant un herbier ancien celui de Monsieur L (1885-1891), il utilise les pages comme support à ses distillations, à ses héliographies ombragées de couleurs vivaces.