Diplômée en Beaux Arts de l’Académie de Lecce et en architecture à l’Université de Turin Riccarda Montenero réunit dans son livre et son exposition « Rue de l’Espérance » 90 images principalement en noir et blanc qui s’organisent en
une narration subtile mais toute en tension.Ce huis clos de corps masculins et féminins se tenant dans la proximité de dessins archaïques débouche sur une sortie dans la réalité actuelle de la ville, celle des émigrés sur les trottoirs de la rue.
Une lecture au fil des pages
Des corps femmes apparaissent en déséquilibre, au bord de la chute
Des corps immergés dans
« Un silence assourdissant » selon Isabelle de Maison Rouge
Puis le corps se complexifie de formes parasites
Deux images drainent la situation
Une trace de sang signe une scène violente
Un corps meurtri
En trois images le corps selon la légende devient papillon
Le corps nu révèle ses blessures
Une robe le fait fleur
Avant que victime un dernier regard au bord de la vie
Les amants se mêlent de tissu et de traits dessinés
Avec la survenue d’un visage d’homme la couleur chair fait son apparition
Qui confirme l’appartenance des deux corps au domaine d’Eden
Face au corps dans la confusion dessinée du rêve
« Quelle part d’espérance nous reste-t il ? » Interroge François Salmeron
accompagnant l’artiste du tourment à l’utopie
En huit images se fonde un autoportrait mêlé de dessins et de fragments de corps et de visages
Après vient le rendez vous avec le portrait ombré de la mort
En tournant la page nous pouvons enfin accéder à la rue de l’espérance, si bien nommée
Là se décline en triptyque le désir de l’autre
Tandis qu’un nouvel autoportrait plus dramatisé se barre d’ombres cicatrices
Le dernier chapitre se trouve ouvert par la question « Où sont les anges ? «
La photographe les trouve dans la rue sous les couvertures de survie
et en couleurs elle déroule la dernière série de portraits de sdf ou d’émigrés abandonnes sur les trottoirs mais « Leur Odyssée dans les yeux »
Un retour critique
L’ensemble se présente dans un camaïeux de gris clairs que l’on pourrait apparenter à la pratique photo dite du high key obtenue en poussant les zones de haute lumière et les blancs dans une image. Les superpositions de clichés qui s’ ajoutent évoquent cette technique du palimpseste en littérature du parchemin dont on a effacé un premier texte pour le réutiliser et dont subsiste des traces. On peut se référer aussi à ce terme en archéologie égyptienne où le mot désigne les modifications apportées par un souverain dans le cartouche d’un pharaon précédent. Mais c’est bien plus évidemment en psychologie que l’on trouvera le sens de cette expression où le palimpseste permet de substituer des faits nouvellement mémorisés à ceux qui leur préexistaient dans la mémoire. Les temps mêlés qui sont à l’oeuvre dans ce livre scénarisent les moments de vie plus dramatiques et les séquences de possible résilience. Pour ce faire à la transparence des lieux d’intimité succède et s’oppose l’opacité charnelle des corps restant pourtant diaphanes. L’alternance de tonalité pastels et de dessins qui trahissent l’inconscient corporel se résout dans l’arrivée de couleurs plus charnelles , alternance qui renvoie aussi aux moments de doutes et à des espérées venues de l’espérance.