La galerie Magda Danysz expose sur ses deux niveaux les oeuvres de VHILS en lien à différents espaces urbains qu’il investit pour y prélever des matériaux ou enrichir les supports de portraits d’anonymes qui se trouvent ainsi honorés. L’ensemble fort sensible est regroupé sous le titre « Spectra »
Né en 1987 Alexandre Farto artiste portugais après avoir commencé des études de graphisme et d’animation en 2D et 3D, quitte Lisbonne et déménage à Londres en 2007 pour étudier les Beaux Arts à la célèbre Central Saint Martins College of Art and Design.
C’est à la suite de la révolution des Œillets en 1974 qui secoue son pays natal qu’il s’intéresse aux murs chargés d’histoire, et décide d’en explorer toutes les possibilités plastiques. Il prend alors selon la tradition récente des graffeurs son nom d’artiste VHILS. Reprenant à son compte le terme de Léonard de Vinci pour la sculpture il opère par via di levare une forme de taille qu’il applique sur d’autres supports urbains actuels.
Par sa méthode intitulée Scratching the Surface, Vhils sculpte des portraits de personnes anonymes sur des pans de murs dans la ville. J’ai découvert son oeuvre à l’occasion d’une rencontre critique à l’invitation de Magda Danysz pour présenter notre livre « lacritique.org, 17 ans d’une revue en ligne » publié par Naima et les Presses du réel . J’y ai rappelé que mon parrain pour l’AICA était Pierre Restany. Lui qui a démenti la croyance selon laquelle on est jamais que le critique d’une seule génération aurait adoré la façon dont Vhils réactive les méthodes des affichistes du groupe des Nouveaux Réalistes. Après avoir récupéré des couches épaisses d’affiches publicitaires dans les rues de la ville il se les approprie en y faisant ressurgir des visages par le collage, le dessin ou la peinture.
Son œuvre ne se limite pas aux murs : il expérimente d’autres techniques et d’autres médiums comme l’acide, les explosifs, la sérigraphie, des portraits sculptés dans un bloc de polystyrène. Il n’a jamais cessé d’explorer de nouveaux supports qu’il s’agisse du béton des murs, du papier, du bois de portes recyclées, de plaques de métal ou encore de résine.
Au rez de chaussée de la galerie ses dernières productions sont faites de carreaux de céramique habituellement décorés à la peinture mais qu’il parvient à sculpter malgré leur très grande fragilité. Connus sous le nom d’ « azulejos », ces petits carreaux de céramique sont significatifs des constructions portugaises, depuis XVe siècle. Ils jouaient le même rôle pédagogique que les vitraux au Moyen Age pour raconter visuellement des histoires et défendre des valeurs morales ou sociales à une époque où les livres étaient un privilège et où seule une élite savait lire. A une technique traditionnelle il ajoute des technologies de report des images très sophistiquées.Le résultat en est très subtil pour rendre ces portraits plus mobiles, qu’ils soient dans une dimension fractale ou simplement spectrale.