Le nouveau livre d’artiste de Renaud-Auguste Dormeui publié par Julien Bézille pour les éditions Naima « D’après nature » s’inscrit dans la poursuite de son oeuvre si difficile à qualifier, toujours interrogeant nos certitudes et notre rapport au réel. Cette publication accompagne l’exposition « Les arbres en seront pas moins verts qu’au printemps » qui se tient tout l’été à la villa Médicis.
Né en 1968 Renaud-Auguste Dormeuil est représenté par la galerie In Situ Fabienne Leclerc , il enseigne à l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy .
Il pratique photographie, vidéo et installation pour explorer les « nouvelles cartographies » et les obsessions sécuritaires. Tout récemment il s’est ainsi fait connaitre par sa série de fiction documentaire « The Day Before_Star System » reconstituant par ordinateur la voûte céleste le jour précédant un bombardement militaire sur des populations civiles dont Guernica ou Hiroshima jouant de l’opposition entre visible et invisible, nature et Histoire.
Dans son travail la question du point de vue et une réflexion critique sur les technologies de la communication et leurs usages sont souvent mises en relation à des faits historiques. Entre document et archives retravaillées il crée des oeuvres qui échappent à des catégorisations simples.
Son installation photographique Fin de représentation, s’inspire de l’histoire d’une jeune Allemande de l’Ouest qui, dans les années 1970, pour entrer dans la clandestinité de la lutte armée terroriste fit disparaître toute trace iconique de sa personne pour ne jamais pouvoir être identifiée. L’artiste a ré-enacter cette disparition en la mettant en scène avec une jeune femme de vingt-six ans, qui a accepté de soumettre tous ses documents images , photo ou vidéo, depuis sa naissance. Ces documents intimes ont été rectifiés par Renaud Auguste Dormeuil pour que ne reste plus d’elle que des silhouettes noires au milieu de cette série de photographies.
Un autre type d’intervention graphique fait l’objet de ce nouveau livre. Le corpus pré-sélectionné par l’artiste correspond à différentes époques de l’image imprimée, de la gravure à la carte postale jusqu’aux clichés argentiques aux bords dentelés. En choisissant un titre qui fait référence à une pratique soit picturale soit sculpturale, il démontre comment l’effet de nature a reculé et meêm disparu dans un monde du tout à l’image qui s’est accéléré et généralisé depuis plus de deux siècles maintenant.
La plupart de ces images sont des clichés, des chromos de paysage ou de plus rares scènes urbaines. La représentation la plus redondante est celle de la cathédrale Notre Dame de Paris, la série commencée après l’incendie dramatique de 2019, ce qui semble avoir motivé sa mise en oeuvre en réaction de sauvegarde symbolique. Les ajouts graphiques d’incendie , n’interviennent pas toujours au premier plan nous obligeant à une lecture plus attentive de l’ensemble de l’image.
Pour rendre plus crédible ses ajouts les rehauts se font selon différentes techniques artisanales , peinture à l’huile , gouache, aquarelle, encre de Chine, d’autres documents sont modifiés manière plus technologique grâce à une imprimante. Le travail de couleur semble le plus créatif , mais les interventions en noir et blancs sont également très subtiles, en s’adaptant aux supports originaux.
En postface l’analyse de Judicaël Lavrador revient sur la lente élaboration de la série pour montrer ses conséquences sur le rapport au réel dans le lien à la double temporalité de la représentation. Elle en déduit à juste titre le caractère de vanité communicationnelles de ces documents rendus fictionne