Viviane Esders a été une des premières galeristes parisiennes spécialisée en photographie depuis 1980. On sait qu’elle a défendu les plus grands représentants de la photographie directe comme Henri Cartier-Bresson ou Hervé Guibert. L’annonce de son prix il y a deux ans pour les photographes de plus de 60 ans non-représentés par une galerie a été salué par tous, moi parmi les premiers.
La plupart des prix et des bourses concernent de moins de 30 ans et le prix Nièpce pousse cette limite aux créateurs de moins de 50 ans. On connait les difficultés à poursuivre une oeuvre dans la durée en se renouvelant à l’intérieur d’un champ de recherche. On connait aussi le grand nombre de bons, d’excellents artistes non-défendus par une galerie ou un agent. Ces derniers consacrent d’ailleurs plus souvent leur action aux professionnels plutôt qu’aux artistes.
L’an dernier le 1er prix a récompensé Mario Carnicelli,un reporter italien dans la lignée du courant humaniste en noir et blanc. La scène italienne n’étant jamais assez bien représentée en France, cette découverte était dans la logique du parcours de la galeriste.
A l’annonce des 6 short listés de cette année j’ai été enthousiasmé de retrouver le nom de Nancy Wilson-Pajic. Elle était représentée comme beaucoup d’artistes internationaux et français qui ont compté par la regrettée Michelle Chomette autre pionnière en ce domaine. Elle y figurait auprès de Paolo Gioli, de François Méchain de Patrick Bailly Maitre-Grand…..
Pour moi il était évident que Nancy Wilson-Pajic dont les oeuvres sont présentes dans tant de collections importantes allait être gagnante. Si une hésitation était possible pour moi , selon le jury, elle aurait pu être en concurrence avec Payram , dont le travail avait le mérite d’un engagement éthique et politique en tant qu’exilé et d’une pratique expérimentale dans la finalisation des tirages.
Le jury 2023 a choisi Pierre de Vallombreuse, un autre tenant d’une photographie humaniste directe en noir et blanc. L’engagement de ce créateur n’est bien sûr par remis en question. L’an dernier l’élimination de Florence Chevallier et de John Batho donnait le même signe : les photographes de plus de 60 ans ne pratiqueraient que la straight photographie en ignorant la couleur !!!!!
Que Viviane Esders assume cette intenable position, qu’elle diversifie encore son jury, ou qu’elle corrige l’intitulé de son prix pour assumer ses choix passéistes . Les nombreux photographes plasticiens de plus de 60 ans qui poursuivent avec exigence leur oeuvre, menant des recherches esthétiques toujours renouvelées mériteraient aussi de gagner les 60 000 euros de ce prix, mais ils n’ont ni temps ni argent à perdre pour des dossiers remis à un prix où ils ne peuvent pas être récompensés.