Désormais académicien, Giuseppe Penone continue, par sa démarche, d’intéresser critiques, historiens, artistes et autres acteurs du monde de l’art. Son œuvre a fait maintes fois l’objet d’expositions, de colloques, d’ouvrages. La parole de cet artiste est précieuse pour aborder en profondeur son œuvre. En cela, les entretiens permettent de nous éclairer sur des points précis et d’ouvrir d’autres pistes de lecture. Dans l’ouvrage « Respirer l’ombre » , publié en 2009, Penone se livrait déjà sur sa création.

Sculpter, ce livre de format quasi poche relate l’intervention de l’artiste lors d’une conférence au Nouveau théâtre de Montreuil, le samedi 12 décembre 2009. Dans son avant-propos, Gilberte Tsaï, à l’initiative de celle-ci, relate sa découverte de l’œuvre de Penone, lors de promenades dans le parc du domaine de Kerguéhennec, Morbihan, Bretagne. Depuis sa rencontre avec la sculpture Sentier de Charmes, elle confie l’émotion qui s’est installée en elle et qui l’a convié à partager l’œuvre de l’artiste au plus grand nombre. Les éditions Macula ont permis la restitution de ce temps d’échange passionnant.

L’artiste d’origine italienne revient sur le cœur de son travail de sculpture. Même si pour lui, les mots ne peuvent répondre convenablement au travail de la sculpture, son témoignage oral nous éclaire sur la recherche de l’émerveillement, à l’origine de son œuvre. Puis, évoquant sa toute première intervention artistique, il convoque le sens tactile. Vient ensuite le souffle qui influe sur les feuilles (« Ce sont des sculptures automatiques que font inconsciemment tous les êtres vivants » suggère-t-il). L’empreinte est aussi porteuse de sens dans ses travaux.

Penone observe avec attention les structures fluides d’où l’appellation « sculptures fluides ». Ses œuvres mettent en évidence la croissance, un mouvement où force de gravité et force de la lumière s’allient. Telles en témoignent ses œuvres créées pour le parc des sculptures fluides à la Venaria Reale, près de Turin. S’il utilise le bronze comme matière semblable au végétal, le marbre, dit-il, l’amène à révéler un réseau de veines. En somme, attentif aux arbres et aux feuilles, il expérimente de nombreux gestes et tend à exprimer leur temporalité. Ainsi, l’interaction entre l’homme et les éléments naturels se donne à voir.

D’autres notions émergent notamment au travers d’un échange. Le sculpteur revient sur le temps propre à la sculpture. « Mon travail est une réflexion sur les éléments de la vie de tous les jours » affirme-t-il. Il poursuit ses réponses en précisant la relation avec les éléments de la nature. Il confie les utiliser afin de réfléchir autrement la question de la sculpture. De même, pour l’artiste, l’installation d’une sculpture à l’extérieur implique toujours un questionnement sur les proportions.

Les écrits et les travaux de Penone ouvrent la voie à une connexion profonde entre un travail de sculpture et les éléments naturels. Ses propos résonnent avec l’actualité de pratiques artistiques à partir desquelles nous pouvons envisager des relations avec le vivant, comme co-créateur de l’œuvre.
À mon tour de vous partager cette lecture et au-delà, de vous transmettre mes expériences de proximité avec cette œuvre. Je me revois le pas assuré et le regard averti, parcourant les parcs de sculptures où celles de l’artiste, parfois, faisaient corps avec la végétation alentour. Mon approche des éléments naturels, des jardins, lieux de rêverie, de contemplation, d’attention et d’apprentissage me guide vers les interventions sculpturales de Penone. Je vous invite maintenant, à écouter les sons de la nature, à marcher là où les êtres vivants et les pierres vous indiqueront un possible chemin. Suivez votre intuition et la vie n’en sera que plus belle.