A l’invitation du commissaire d’exposition Noah Koshbin, Robert Wilson rend hommage à un des plus grands collectionneurs italiens Giuseppe Panza di Biumo (1923–2010). Dans la villa de Varese l’artiste américain né en 1941 installe un ensemble de vidéo sous le titre général « Tales ». Ces contes renvoient aux aspects multifaces de sa création où la théâtralité reste centrale. L’image très technologique met à contribution l’histoire de l’art et des célébrités actuelles qu’elle oppose au monde animal.
La collection Panza s’est engagée en 1956 autour des peintres de l’art informel tels Jean Fautrier et Mark Rothko. A partir de 1966 elle se tourne vers le minimalisme et les œuvres lumineuses de Dan Flavin . En peinture elle se poursuit avec les œuvres de Robert Mangold, Brice Marden ou Robert Ryman. Cette collection trouve sa reconnaissance institutionnelle par son acquisition partielle au MOCA de Los Angeles dès 1984, puis par son intégration à la Solomon R. Guggenheim Foundation dix ans plus tard.
Devenu un musée public géré par le Fondo per l’Ambiente Italiano la villa de Varese, dans la famille du collectionneur depuis les années 1930, accueille à partir du début 1970 dans ses anciennes écuries et dans l’ensemble de ses bâtiments du XVIII° siècle des œuvres post minimalistes, nombre de monochromes, et des installations permanentes commandées à des artistes comme Dan Flavin, Robert Irwin et James Turrell.
Dans cette villa du lac majeur, l’artiste américain a conçu une installation avec ses propres œuvres vidéo qui entrent merveilleusement en dialogue avec ces propositions plus minimales selon un principe scénographique qu’il a énoncé pour ses propres créations scéniques :
« Si vous posez un chandelier baroque sur une table baroque, explique-t-il, les deux disparaissent. On ne voit ni l’un ni l’autre. Si vous posez un chandelier sur un rocher dans la mer, vous commencez à voir ce que c’est. »
Dans ses scénographies comme dans ses vidéos ici exposées la lumière reste l’élément fondamental :
« La lumière est très importante. Einstein disait que la lumière est la mesure de tout. Nous passons de longues heures à éclairer les œuvres
et sans la lumière il n’y aurait pas d’espace. Au théâtre, la lumière est l’élément essentiel, car elle nous permet de voir et d’entendre. C’est ce qui produit la couleur et l’émotion. »
Ses premiers portraits vidéos ont été réalisés au Centre Pompidou en 1977-1978 dans le cadre de Video Fifty. Parmi la centaine d’épisodes de 30 secondes il a portraituré Pontus Hulten le directeur du Musée, Michel Guy, qui était ministre de la Culture ou Louis Aragon, qui avait salué son talent en écrivant sur sa première pièce de théâtre.
Cette logique des contes et leur figures familières a déjà été utilisée par l’artiste pour un vidéo opéra de 2002 Three Tales sur une musique de son habituel complice Steve Reich. Les pièces courtes présentées ici hésitent entre une histoire de l’art marquée par la violence humaine à un monde de beauté plus féminin. Lady gaga reprend la pose dans la baignoire de Marat par David ou réincarne la tête de saint Jean-Baptiste sur un plateau. Mais elle est aussi Mademoiselle Caroline Rivière, d’Ingres portrait de 1805. De même Isabella Rossellini est filmée en princesse manga.
La solitude de ces personnages historiques toujours centrés dans l’écran peut passer par d’autres champs d’expériences humaines, Lady Gaga encore elle, subit un attachement de type bondage dans Flying, tandis que le premier prix Nobel de littérature chinois Gao Xingjiang voit cette maxime s’affichée sur son visage « solitude is a necessary condition of freedom ».
Les liens se font dans l’esprit du visiteur qui doit faire les raccords entre les monochromes qui servent de décor à ces contes, les figures marquées par l’histoire et les animaux incarnant une forme de sagesse. La violence, l’érotisme et les passions humaines génèrent ces rencontres.