Entre septembre et octobre 2008, TIAN Ye a exposé ses peintures récentes dans trois musées importants en Chine, Le Musée National d’Art de la Chine (National Art Museum of China, NAMOC) à Beijing (Pékin), le Musée d’Art Moderne et Contemporain de Yinchuan, dans la Province autonome du Ningxia, musée inauguré pour l’occasion, où une rétrospective de l’œuvre de TIAN Ye a été présentée, et le Musée Dolan, dans le quartier Dolun à Shanghai.
TIAN Ye va très prochainement exposer à la Maison de la Chine à Paris, un florilège de ses peintures en compagnie d’un autre peintre de sa génération, WU Tinghua.
Le regard que TIAN Ye porte sur l’évolution de l’histoire et de l’économie de son pays, la Chine, et de la relation de cette évolution à celle que connaissent toutes les nations du monde lui permet d’incorporer à ses recherches picturales des données historiques, économiques et culturelles, qu’il réinterprète selon l’optique d’une interrogation critique des mutations actuelles des sociétés et, plus particulièrement de la société urbaine et notamment chinoise.
De la peinture de paysage, telle qu’il l’avait réinterprété lors de son séjour en France, séjour qu’il avait effectué dans le but de confronter ses connaissances et sa pratique d’une peinture gestuelle aux œuvres exposées dans les galeries et les musées occidentaux, il est passé à des peintures, toujours majoritairement de paysage, où il organise des « figures-signes » qu’il structure en plans étagés avec simplicité selon des lois de composition déjà éprouvée par des artistes des mouvements français de la Figuration narrative ou de la Figuration critique tels que Gérard FROMANGER ou Bernard RANCILLAC, « figures-signes » aux couleurs vives, acides même, qui peuvent évoquer celles qui avaient la prédilection de certains artistes Pop. Et, de même que ces prédécesseur là l’on fait, il pratique l’art du « détournement ». Si les œuvres de TIAN Ye peuvent être reliées à ces mouvements, ce dernier crée cependant de nouveaux agencements formels et chromatiques où il élabore un code de réinterprétation picturale des informations.
Ce que TIAN Ye détourne, ce sont les emblèmes des deux grandes idéologies qui se partageaient le monde à l’époque de sa partition bipolaire et il les détourne pour mieux confronter ces emblèmes les uns aux autres et pour mieux en donner à voir les contradictions, exacerber même ces contradictions. Et pour donner plus de clarté à ce questionnement critique de l’évolution de l’histoire culturelle et socio-économique, TIAN Ye redouble ses « figures-signes » de signaux puisés dans le répertoire des divers codes routiers. Ces signaux, associés deux à deux et perchés au sommet d’un fin poteau peint dans l’axe du tableau (à l’exception néanmoins du grand triptyque qui concerne Shanghai) partageant l’image en deux parties égales, sont eux-mêmes détournés pour introduire les caractéristiques de ce monde en mutation que TIAN Ye a repérées.
Si la peinture de TIAN Ye est loin d’être réaliste, chacun de ses ensembles de « formes-signes » constitue l’image d’une société bien réelle. Les inventions de TIAN Ye répondent au désir de peindre la réalité du monde tout la mettant, sans nostalgie ni amertume, en relation avec un monde qui va disparaître quant il n’a pas déjà disparu et un monde au devenir hypothétique.
L’essentiel du travail pictural de TIAN Ye consiste à redonner une vie nouvelle à l’image du monde dans la volonté d’y associer couleur, structure, sujet, idée où le pouvoir d’énonciation est manifeste. Il réconcilie ainsi création esthétique et conscience socio-économique et culturelle et cherche à imposer l’idée que ses recherches sont liées aux mouvements souterrains de la société.