L’état de choc que nous avons ressentis et vécus en commun, lorsque nous nous sommes trouvés, à cause d’un virus, confinés et cantonnés chez nous, nous a plongé dans une stupeur globale. Cette sensation de flottement étrange au bord de l’abrutissement ou de l’ennui, tout un chacun la connaît.
Une impression à l’inverse du saisissement, l’on pourrait même parler d’un dessaisissement comme du trouble qui nous empêche d’aller jusqu’au bout du traitement d’une affaire. Comme si une virgule pouvait déplacer le cours d’une phrase. Car tel est bien le cas. Un grain de sable, ou le battement d’ailes d’un insecte -selon l’effet papillon- peuvent bouleverser le cours des événements et les amener à dévier de leur trajectoire de manière à peine tangible.
Le registre de perception dans lequel œuvre le duo comma est de cet ordre. Cette sensation d’événements bouleversés, part bien souvent d’une situation anodine. Tout comme comma signifie virgule en anglais, les deux artistes, Clémence Choquet et Mickaël Gamio, qui agissent sous ce nom générique, nous donnent à percevoir et à penser des micros imprévus, phénomènes tout juste palpables, aspérités, déformations, contretemps et autres incidents.
Ainsi dans un tunnel filmé au Japon le fracas du train passant sur les rails fait surgir à toute vitesse des images de la persistance rétinienne, de frêles maisons traditionnelles en butte avec des constructions plus récentes. Ils attirent notre attention sur le presque rien, le peu, le sans valeur ou quasi, des pièces de centimes, des cailloux, de la cire ou de la cendre, du savon, de la lessive, des tatamis, le bruit blanc, le cuivre… qui servent de révélateurs à des réalités plus crues et dures qu’elles n’y paraissent. Ils agissent dans l’infra-mince en toute subtilité.