Nathalie Boulouch est historienne d’art. Elle effectue actuellement une mission confiée par le Musée de Bretagne et le CNRS sur la photographie en Bretagne de 1975 à 2004. Cela m’a fourni l’occasion de la rencontrer pour évoquer notre action commune avec l’association Photographie Contemporaine en Bretagne dont j’ai été le conseiller artistique de 1989 à 1996. Elle est aussi actuellement la commissaire de l’exposition « Vivre le sport » au Musée de Bretagne.
Sa large sélection d’images de 1900 à 2019 s’appuie sur un double corpus. Elle a privilégié les originaux, mais aussi les négatifs et plaques de verre de la collection du Musée dont elle a fait procéder à des tirages. Elle a pu aussi choisir des vues de l’Inventaire du patrimoine de la Région Bretagne. Beaucoup de ces productions dans des cadrages d’une grande rigueur, souvent frontaux, témoignent des espaces architecturaux des équipements sportifs. C’est ainsi que s’ouvre l’exposition avec des vues de stades, de piscines, de cours de tennis. L’intelligence de cet accrochage est d’avoir, à côté de ces photos à l’esthétique documentaire stricte où on admire notamment le travail de Charlotte Barraud, accroché des clichés plus anciens moins rigoureux. Pour les distinguer sont utilisés des tailles et des encadrements différents. De même, les originaux noir et blanc et aux couleurs initiales sont présentés sous passe-partout.
Dans une seconde salle, ce sont les clichés attendus de photo sportive respectant le dictat d’Henri Cartier-Bresson du « moment décisif » qui alignent des actions les plus spectaculaires saisies dans l’apnée du mouvement.
Bien qu’on soit en Bretagne, il existe peu dans la collection d’images des régates et autres compétitions maritimes. De même, s’en étonnera-t-on, les sportives sont peu représentées, si ce n’est en gymnastique et basket-ball. C’est aussi pourquoi, par opposition à cette invisibilisation, Nathalie Boulouch a choisi pour affiche cette image de trois gymnastes sur leur barre avec le public flou à l’arrière-plan. Elle est l’œuvre d’Etienne Le Grand, opérateur professionnel dont on remarque immédiatement dans toutes les salles la qualité de regard et de composition.
Le sport a toujours attiré son public dédié, c’est l’objet de la troisième salle. Face à ces multiples images des supporters des portraits collectifs d’équipe de football , la commissaire nous en montre l’évolution de 1900 à nos jours dans ces poses de groupe stéréotypées mais sociologiquement significatives. On constate en effet l’évolution des tenues, mais aussi l’apparition des premiers sponsors sur les maillots.
Dans l’exaltation de la ferveur publique, des images de Tours de France de diverses époques montrent l’évolution du contexte publique avec la multiplication des équipages publicitaires actifs dans leur esthétique plus ou moins kitsch.
Si certaines photos ne sont pas datées, une sélection de petits extraits filmiques, des mêmes évènements captés en noir et blanc et couleurs permet des situations dans telle ou telle époque. Ils différencient les actions en leur attribuant une temporalité.
Les évènements sportifs démutiplient leur intérêt pour les photographes de presse que quand ils donnent lieu à la célébration collective de victoires nationales.
Dans une progression visuelle d’une grande force, l’exposition se termine sur des images faisant correspondre la ferveur populaire lors des grandes manifestations avec des images très expressives au cadre saturé, agrégeant visages hurlants, corps en attentes et signes graphiques.