Gilles Dreydemy ouvre une galerie d’art contemporain à Besançon, c’est l’App’Art, sise au premier étage d’un bel immeuble au 15 rue Ronchaux, à quelques encâblures de la citadelle. La première exposition, visible jusqu’au 16 décembre prochain, présente le travail de Pierre Ribà et de Martin Miguel et s’intitule poétiquement « Libre circulation ».
Florence Andoka Comment est né votre désir d’ouvrir votre galerie, l’App’Art ?
Gilles Dreydemy Cette idée est née d’un désir très puissant de créer une relation forte entre les artistes et le public grâce à des échanges, dans un lieu qui inspire et qui facilite le rapprochement. Ouvrir son appartement aux amis, aux amis d’amis, aux amateurs d’art permet d’instaurer de nouvelles relations entre les artistes, les bisontins, les visiteurs…Des échanges riches intellectuellement même s’il existe nécessairement une contingence économique destinée aussi à aider les artistes.
FA Vous avez longtemps été collectionneur. Quelle est votre sensibilité esthétique ? En fonction de quels critères choisissez-vous une oeuvre ?
GD J’ai surtout été « regardeur » et les nombreuses foires, salons, festivals sur lesquels j’ai eu l’occasion de me rendre,de Miami à Bâle en passant par Montréal, Madrid, Kassel, Bruxelles, Pékin, New York… ont conforté ma
sensibilité de la recherche formelle du beau et de recherches esthétiques nouvelles avec une préférence minimaliste.En ce qui concerne le choix des oeuvres, j’ai mes propres critères… Je cherche une présence, une densité, un rapport à l’espace.
FA La première exposition de l’App’Art s’intitule Libre circulation, et présente des pièces réalisées par Pierre Ribà etMartin Miguel. Quel est votre parti pris pour cette exposition inaugurale ? Comment avez-vous choisi de mettre en
regard le travail de ces deux artistes ?
GD Je viens de vous définir les critères que je privilégie. S’agissant des artistes, Martin Miguel utilise le béton pour ses oeuvres, béton qu’il fait dialoguer avec la couleur en ayant une constante référence à l’art pariétal. Lascaux est pour Miguel ainsi que pour nous tous, le plus ancien
témoignage de l’art dans les sociétés. Ce que je perçois chez lui, c’est la netteté des formes, la force évocatrice des images, la pertinence des couleurs. Ce que je comprends, c’est la justesse du rapport à un espace, du rapport à son
format. Miguel a osé mettre ses mains, ses matériaux, ses outils dans les formes qui évoquent Lascaux, formes parfois esquissées, parfois incomplètes que notre mémoire s’efforce de compléter.
Pierre Ribà réalise ses sculptures par assemblage de carton, bois, métal et cordes .Ribà, c’est la simplicité des formes. Entre la sérénité des origines et les déchirures de la vie, il a découvert la poésie d’un matériau : le carton
Ses sculptures sont un hommage à l’art primitif qu’il se réapproprie au gré de sa fantaisie.
Pierre Ribà affectionne les formes simples, épurées. Pas de place pour l’anecdote, il va au plus pur, au plus vif…vers l’essentiel ! des figures qui intriguent, interrogent , séduisent aussi ! J’avais envie de réunir ces deux artistes dans cet espace privé et privilégié qui se veut lieu de rencontre et de
métissage artistique. Leur approche formelle est différente mais ils puisent tous les deux leur inspiration créatrice aux premiers temps de l’Humanité.
FA Vous souhaitez soutenir la création émergente, mais quelle sera la ligne esthétique de votre galerie ?
GD En effet, quel bonheur de pouvoir offrir à un artiste sa première exposition …Je trouve qu’aujourd’hui la situation de ces jeunes artistes est complexe. J’aimerais essayer de construire une relation forte entre eux et le public. Pour
cela, il faut avant tout leur faire confiance. S’agissant de la ligne esthétique, bien que les formes classiques comme la peinture et la sculpture soient toujours
plébiscitées, je pense qu’il y a aussi la place pour des oeuvres plus conceptuelles ainsi que pour la photographie.
FA Une galerie, en tant qu’initiative privée reposant sur la présence des collectionneurs, induit-elle l’exposition de certaines formes d’art contemporain ? Comment s’oriente votre choix par différence avec la programmation d’un
centre d’art ?
GD La programmation des centres d’art n’est pas ma préoccupation.A mon sens, quelles que soient les formes d’art, il est nécessaire d’avoir de la rigueur. On peut proposer une programmation plus radicale et une autre plus « accessible »…Finalement, le plus important est de toujours proposer des expositions de grande qualité et d’avoir une envie très forte de présenter un art qu’on a à coeur de défendre. Notre rôle en tant que galeriste, au même titre que les centres d’art, est d’aider à faire comprendre la vision de l’art.
Il s’agit d’un véritable travail de transmission au public.
FA Vous avez choisi de créer votre galerie dans un appartement. Qu’est-ce que cela implique ?
GDC’est un écrin !
FA Besançon est une ville moyenne dont les galeries ont progressivement disparu au cours des dernières années, comment envisagez-vous de travailler avec les acteurs culturels locaux afin de pérenniser votre projet ?
GD L’art contemporain est devenu un vrai vecteur de communication, un sujet d’intérêt général et de plus en plus accepté. C’est aussi un vecteur culturel, touristique et même de qualité de vie ! pour exemple ces communes qui ont
investi dans des sculptures monumentales pour améliorer les entrées de ville..
Il faut essayer de surfer sur la vague en attirant encore davantage de touristes et de visiteurs grâce à des évènements comme le « printemps de l’art contemporain à Besançon »