Le Centre chorégraphique national d’Orléans a présenté en ouverture publique « Glitch Witch » la dernière création de Meg Stuart. Elles sont trois qui s’ébattent sur un sol de cailloux noirs comme des déchets volcaniques, décor imaginé par la scénographe Nadia Lauro, d’où surgissent une vingtaine de petits dômes à facettes. Elles sont habillées de noir, pantalon court collant sumonté d’un surtout flottant et partent en exploratrices de ce terrain inconnu.
Meg Stuart, danseuse et chorégraphe américaine née en 1965 à La Nouvelle-Orléans a connu ses premiers succès internationaux avec Disfigure Study (1991), et No One Is Watching (1995). En 1994, s’établissant à Bruxelles, elle fonde sa compagnie Damaged Goods avec qui elle évolue librement entre la danse, le théâtre et les arts visuels. Si elle a collaboré avec des plasticiens comme le vidéaste Gary Hill pour Splayed Mind Out, lors de la documenta X à Cassel en 1997 ou la plasticienne américaine Ann Hamilton pour Appetite (1998), elle produit cette pièce avec le Dance On Ensemble, qui se donne pour mission de revaloriser des danseur·euse·s et chorégraphes plus âgé·e·s.
Depuis 2018 la danseuse noire américaine Omagbitse Omagbemi appartient à cet ensemble. Elle a notamment dansé pour Yvonne Rainer et Deborah Hay. Mieko Suzuki troisième intervenante née à Hiroshima et basée à Berlin est une artiste sonore, compositrice, DJ et performeuse. Elle mixe des sons de drone et des enregistrements de terrain. Elle manifeste toujours une attention particulière à l’espace de ses interventions. Les trois femmes ont des gabarits physiques différents, seule la dynamique dansée les unit.
Glitch Witch est un jeu vidéo fonctionnant comme un puzzle rétrofuturiste dédié à des technologies fonctionnelles où l’on peut naviguer dans des espaces urbains, On sait que dans les jeux vidéo le glitch est une faille de programmation, les deux termes associés les moteurs de traduction proposent « Sorcière de l’oubli ».
Dès le début de la pièce, les trois performeuses chaussent des lunettes, elles agissent comme si elles avaient des pouvoirs de réalité augmentée. Elles semblent modifier leu déplacement comme en quête d’une appréhension exploratoire du site. Puis le rythme s’accélère comme si elles devenaient sensibles au souvenir de transes passées. Mieko Suzuki, a rejoint ses platines en recherche syncopée des rythmes de sa musique électro pour d improbables unissons.
Dans une seconde phase, les trois femmes quittent le plateau pour revenir les bras chargés de différents vêtements tous singuliers, avec des matières vives et hautes en couleur. L’essayage profile des personnalités différentes, échantillons d’une humanité en création qui retrouvent le chemin d’une aventure commune à danser.
Comme pour mieux partager leur expérience et échanger leurs pratiques, Meg Stuart investit les platines de sa complice et le set se poursuit en rythme et complicités joyeuses.
Plus qu’un trio, on est porté à parler de triade, mot défini comme ensemble de trois personnes étroitement associées, en particulier de trois divinités d’un même culte et en musique elle constitue un accord parfait à trois sons. Malgré les failles du parcours, les trois sorcières dansent un possible futur commun, même si la pièce ne s’arrête pas sur un happy end, mais sur le retour de chacune à son propre chemin.