« A l’origine, il y a l’invention, en 2006, d’une revue par des artistes et des écrivains réunis autour d’Aurélie Aura et Yoan Armand Gil. Suivie très vite de la création d’une maison d’édition. En huit années, quinze numéros de la revue verront le jour, plus d’une soixantaine d’ouvrages (et autres projets éditoriaux) seront réalisés par plus de quatre-vingts auteurs et artistes. Plus quelques expositions…
Ce qui unit toutes ces personnalités dans Venus d’Ailleurs réside dans un esprit et une esthétique. Une conception du livre comme merveille, musée portatif, utopie libertaire à s’approprier, entreprise sans fin et espace collaboratif d’expérimentation graphique et littéraire. De beaux ouvrages, souvent de petits formats, peu chers, très soignés, sortent de l’Atelier Venus d’Ailleurs, imprimés par In Octo. » Joelle Busca Etoile Filante
Quelle est votre situation économique actuelle ?
Yoan Armand Gil – En l’absence de manifestations culturelles c’est le point mort pour la micro édition indé. Nous sommes une petite structure qui n’a pas souffert de deux mois de confinement, nous avons adapté nos activités, favorisant de fait la création et la production. Mais ces deux mois pourrait être suivis d’une petite éternité. Ce qui est plus inquiétant, c’est de voir que « l’après » risque d’être plus dystopique que « l’avant »… J’ai peur que le tigre soit assez bureaucratique, un peu à l’image du taureau de l’ancien temps. Et chez Venus d’ailleurs, on a toujours préféré un vieil éléphant de cirque à une langue de bois.
Quelles précautions avez vous prises pour répondre aux menaces sur le secteur ?
YAG – Nous avons levé le pied ne voyant qu’une partie de l’iceberg. Conservant notre sens critique pour repartir sur les chapeaux de roue.
Quelles sont les collections qui marchent le mieux ?
YAG – Toutes et aucunes en particulier.
Quels sont vos livres phares ?
YAG – Tous nos livres sont lisibles de nuit. Mais certains plus réfléchissant que d’autres : Effrayantes lignées de Michel Cadière, La série complète de la revue Venus d’Ailleurs, Mad is Rose de Lou Dubois, Le traité de cocotologie de M. de Unamuno avec les collages d’Yves Reynier…
Quels sont vos projets dans les 6 prochains mois ?
YAG– A l’heure actuelle c’est encore un peu obscur. Mais nous aimerions réinvestir notre galerie/librairie mobile et présenter nos dernières productions de manière festive. Faire quelques soirées : ciné concert, représentation de théâtre de papier.
Quelles sont vos rapports avec les diffuseurs et distributeurs ?
YAG – Nous travaillons avec quelques librairies en France et en Belgique. Pour le reste c’est de l’auto-gestion.
Attendez vous une réaction et de l’aide du Ministère de la Culture ?
YAG – Non.
Qu’attendez vous des critiques d’art ?
YAG – Je ne sais pas si c’est à nous de le dire. Nous évitons les « il faudrait que ». Nous ne faisons pas de différence avec nos collaborateurs qu’ils soient critique, poète, plasticien, musicien… Nous optons pour « l’attraction passionnée ».
Comment percevez vous vos lecteurs et leur évolution ?
YAG – Une grande partie est fidèle depuis le début et a un goût pour la chose.Se sont des curieux amateurs de curiosités. Mais le grand public est de moins en moins intrigué me semble-t-il. Il y a quelques années, nous étions régulièrement surpris par des non-initiés qui s’émerveillaient devant des œuvres qualifiés habituellement d’incongrues voire d’hermétiques. C’était l’occasion d’échanges…
Comment vivez vous le rapport aux bibliothèques ?
YAG – C’est assez inégal selon les territoires. Certains font un très bon travail, d’autres brillent par leur absence. Certains ont des moyens et d’autres n’en ont pas. Parfois ceux qui n’en ont pas ont des idées et des volontés. Parfois ceux qui ont des moyens sont sourds aux idées et manquent de volonté…
Comment envisagez vous le rapport papier / électronique ?
YAG – Déjà, l’électronique comme alternative c’est bien concernant l’imprimerie massive qui finit souvent dans la poubelle. Des livres d’artistes high tech c’est possible, il y en a déjà beaucoup. Internet a fait bouger les pratiques de pas mal d’artistes éditeurs. Nous n’avons pas d’a priori, personnellement notre médium c’est le papier bien qu’il nous arrive d’incorporer des supports « multimédia » dans certaines de nos productions.