En guise de catalogue pour une exposition collective réunissant des photographies d’arbres (mais pas seulement…), l’atelier cinq d’Arles publie un petit « Zine » captivant à l’occasion des Rencontres Internationales de la Photographie de l’été 2022
L’exposition a été organisée par Corinne Dumas, créatrice de l’association culturelle l’atelier cinq d’Arles en 2010. Cette association a pour belle et plutôt atypique ambition d’être une « entreprise buissonnière où cogiter, bidouiller, avec les moyens du bord, et sans subventions. » J’aime ce programme !
Le texte principal d’ouverture du « Zine » a été rédigé par David Gauthier, critique d’art et commissaire d’exposition , collaborateur de lacritique.org ; il se conclut brillamment ainsi : « ̀ L’arbre donne à penser, dans la mesure où il constitue une énigme ́ (La Douceur de l’ombre, Alain Corbin, Seuil, mars 2013) : beaucoup reste à découvrir de cet organisme vivant sans neurones ni synapses, dont nous devrions nous inspirer pour tenter de mieux vivre ensemble sur la Terre, le plus longtemps possible à l’ère de l’anthropocène. Et l’arbre donne à créer et rêver… in the mood for free comme en témoigne cette exposition chorale. »
Les arbres dénués de neurones possèdent en effet une forme d’intelligence qui leur permet via leurs branches et leurs racines – telles des terminaisons nerveuses – de communiquer entre eux et représentent aujourd’hui un formidable champ d’étude pour les scientifiques. Ils sont, depuis toujours, un formidable motif artistique et symbolique (Cf. par l’exemple l’arbre de vie des celtes anciens…).
Dans l’exposition et les pages du « Zine » chaque sculpteur, dessinateur ou photographe expose sa démarche en français et en anglais de manière tantôt laconique (sécheresse déconcertante de la double page de Pascal Versini où n’est mentionné que son lieu de travail…) ou délicieusement bavarde (on notera par exemple le joli texte dense d’Olivier Bourgoin, directeur artistique de l’agence Révélateur à propos de Franck Landron qu’il représente).
Du fait justement de la diversité stylistique, quel joyeux foisonnement comparable à la sève printanière qui innerve les arbres ! Car la cohérence du projet s’impose naturellement, trouve ses ramifications au plus profond et au plus intime de nous-même : l’arbre n’est pas un prétexte, les enjeux on le comprend vite en feuilletant le fascicule, sont, l’air de rien, dans la légèreté apparente du titre à la résonnance cinématographique, aussi bien écologiques qu’anthropologiques, sinon métaphysiques…