De hautes céramiques humanoïdes, chimériques ou hybrides « Pas tout à fait perdus »

La trouvaille muséogaphique qui rend cette exposition singulière est d’avoir supprimé toutes les cloisons et cimaises de la collégiale, le curateur s‘en explique : « Dans ce fascinant face à face, le visiteur peut tourner autour des œuvres, les jauger, les pièces elles-mêmes dialoguant entre elles et avec la pierre de la collégiale. » Cela constitue ainsi une prolongation de la démonstration des possibilités de la céramique contemporaine avec l’exposition des œuvres de Johan Creten visibles au musée des beaux-arts et dans l’espace public ( nous y reviendrons ).

Chez Laurent Dufour, les créatures sont hybrides, mi-humaines, mi-animales. Des socles souvent abstraits sont surmontés de figures stylisées d animaux dont les titres comme le Lion ailé, le Renard masqué donnent une lecture simplifiée. Il désigne sa pratique dans ce poème « Dans le silence de l’atelier / Mes mains se promènent / Dans des contrées lointaines. / Des aventures s’installent. / Mon lieu devient jungle. / La faune apparaît. / Je rêve sauvage. »

Anne Rochette qui a fréquenté l‘atelier de Georges Jeanclos a été diplômée de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris et a obtenu ensuite un Master of Arts à la New York University . Ses céramiques se muent en des corps presque informes et inquiétants qui cherchent à susciter une présence, une altérité. Ses titres renvoient à des identités féminines Les silencieuses installées dans le cœur, L’attentive qui scrute l‘espace ou Celle qui se fait belle accueillant le visiteur près de l‘entrée. Et l innénarrable L ‘ âaane !

Michel Gouéry d’abord peintre puis depuis le milieu des années 1990, sculpteur, pratique la céramique avec des pièces virtuoses en céramique, son matériau de prédilection, Elles cultivent l’anticonformisme et l’incongru dotées d’une parfaite qualité de la matière lisse ou granuleuse, parfois mat ou avec des effets moirés. Certaines simulent une matière de tissu et d autres comptent des inclusions images photo. On peut y reconnaitre des créatures plus ou moins humanoïdes avec d‘étranges disproportions. Des visages émergent parfois de la matière tentant de s’en extirper. Les titres contribuent avec humour à leur singularité : Ontologie plate dans la vertiglose ou Le chaînon manquant déguisé en homme illustré. Sébastien Pons écrit à leur sujet « C’est un festival baroque de récits, de gestes, de matières, avec des personnages réjouissants, des images cachés, un jeu de transparence, de la dentelle de faïence »